08/09/2011 – 11h00
MORIEUX (NOVOpress Breizh) – Le (très léger) doute qui subsistait sur la mort de 36 sangliers survenue cet été sur la plage de Morieux (Côtes-d’Armor) vient d’être levé : celle-ci est bien due au sulfure d’hydrogène (H2S) dégagé par les algues vertes en décomposition. C’est ce qui résulte des rapports rendus par l’Anses (Agence de sécurité sanitaire de l’environnement) et par l’Ineris (Institut national de l’environnement industriel et des risques). Deux agences gouvernementales qu’on ne peut soupçonner « d’intégrisme ».
Dans son rapport publié mardi, l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris) juge en effet « hautement probable » que la mort des sangliers soit due au gaz dégagé par les algues vertes en décomposition. Ce qui, en langage administratif, peut se traduire par « certain ». Prudente, l’Anses – qui arrive aux mêmes conclusions – prend soin de préciser « qu’on ne peut affirmer qu’il s’agit du seul facteur contributif de la mortalité massive ». Mais à ce jour aucune autre cause n’a pu être établie.
Dans son rapport l’Ineris rappelle que le sulfure d’hydrogène « est un gaz très toxique », « un irritant des voies respiratoires et un neurotoxique par asphyxie ». L’institut souligne que « son odeur caractéristique d’œuf pourri se détecte dès 0,2 à 0,3 ppm (0,28 à 0,42 mg/m3) ; elle est nette pour 20 à 30 ppm (28 à 42 mg/m3), mais vers 100 ppm (140 mg/m3) l’odorat est anesthésié ». Or, à des doses chroniques, les perturbations de l’odorat « sont un handicap pour la vie animale », affirme le rapport.
L’Ineris, qui a évalué les concentrations en H2S, au sol et dans l’air, auxquelles les populations riveraines, ou fréquentant la plage de Morieux et la zone de l’estuaire, sont susceptibles d’être exposées, conclut que pour les expositions de courte durée à des concentrations élevées, qui concernent essentiellement les promeneurs, randonneurs ou chasseurs, des valeurs de 15 à plus de 140 mg/m3 ont été relevées. Des concentrations pouvant entraîner l’anesthésie de l’odorat chez l’homme « au-delà d’une heure d’exposition en continu sur des zones de dépôts d’algues », explique le rapport tout en rappelant que les probabilités d’exposition de longue durée dans les zones les plus toxiques sont faibles, en dehors de cas de chute accidentelle. Cependant, même s’il est peu probable qu’une personne soit exposée aux concentrations maximales, « les concentrations mesurées peuvent atteindre les seuils mortels (2.408 mg/m3 pour une exposition d’une minute)», précise l’institut du ministère de l’Écologie.
L’Anses comme l’Ineris affirment toutefois que les habitants des zones touchées par les algues vertes ne seraient pas en danger : résider à proximité de celles-ci « ne semble pas présenter de risque préoccupant pour la santé ». Les deux instituts recommandent cependant de poursuivre le ramassage des algues pour « limiter les émissions et donc les concentrations dans l’air ainsi que les expositions potentielles. »
L’Anses rappelle enfin que la prolifération des algues vertes est due à « des concentrations élevées de nitrates dans les eaux, apportés par les activités humaines, en particulier l’agriculture, et une configuration physique du littoral ». Selon Gilles Salvat, directeur de la Santé animale à l’Anses, pour limiter cette prolifération, il faudrait « limiter les déchets d’origine animale et les engrais inorganiques pour les cultures, choisir des cultures qui demandent plus ou moins d’azote ou encore instaurer une rotation des cultures. » On ne saurait mieux dire. Reste à savoir si le gouvernement a réellement l’intention de s’attaquer sérieusement au problème. Pour l’instant il en est encore au stade du ramassage. Envisager d’aller plus loin semble manifestement excéder ses capacités d’imagination et surtout de volonté. Sauf changement radical de politique, le mauvais feuilleton des algues vertes a malheureusement encore de beaux jours devant lui.