Heinz-Christian Strache a été durant près de 15 ans le leader du FPÖ autrichien. Il est parvenu à redresser son parti, lourdement affaibli après son exercice du pouvoir en 2000 du temps de Jörg Haider, et la scission du parti par Haider. Parvenu au poste de vice-chancelier en décembre 2017 en formant un gouvernement de coalition avec l’ÖVP de Sebastian Kurz, la carrière politique de HC Strache a été brutalement foudroyée par le scandale d’Ibiza en mai 2019.
Depuis lors, Strache continue d’être actif, même s’il reste en relatif retrait en attendant que les nombreuses procédures judiciaires le concernant se terminent. Il était de passage à Budapest ce vendredi 3 mars, et a accordé un entretien exclusif au journal hongrois Magyar Jelen, traduit de l’allemand par Alsace Actu .
Magyar Jelen: Avant le début de cette interview, vous m’avez dit « Ce qui est positif, c’est que je suis toujours en vie après le scandale d’Ibiza ». Qu’est-ce que cela signifie ?
Heinz-Christian Strache : J’ai la chance que chaque jour – contrairement à Jörg Haider, qui n’est malheureusement plus en vie – je puisse voir mes enfants, j’ai la chance de me relever tous les jours après être allé me coucher, j’ai la possibilité de façonner ma vie et de regarder vers l’avenir.
Et j’ai aussi la chance de pouvoir également faire face, dans cette vie, aux injustices qui m’ont été faites ainsi qu’aux calomnies, et de pouvoir m’y opposer et de les élucider.
Magyar Jelen: Vous étiez vice-chancelier d’Autriche et vous avez dû démissionner. Vous avez été mêlé à de nombreuses procédures judiciaires, notamment avec votre ancien parti politique, le FPÖ. Vous avez divorcé. Sur le plan personnel, humainement, comment avez-vous surmonté tout cela ?
Heinz-Christian Strache : Après ma démission et cette campagne menée contre ma personne, j’ai rencontré un certain nombre d’adversaires politiques, au cours des dernières années, qui m’ont dit : « En fait, nous pensions que tu sauterais d’un balcon ou que tu te pendrais à une poutre. Chapeau d’avoir traversé tout cela comme ça ! ». J’ai dit à l’époque que je ne donnerai à personne le plaisir de leur faire cette faveur.
Et c’est bien sûr dans ces situations difficiles qu’on apprend à connaître le peu d’amis honnêtes qu’on a. C’est une césure dans la vie, une catharsis, où, tel le phénix, on peut renaître de ses cendres, plus fort que jamais, après avoir surmonté tout cela.
Mais avant, on passe par une vallée de larmes, de déceptions et de douleurs, c’est également l’opportunité d’ouvrir de nouvelles portes. Ce qui est aussi décevant, c’est la trahison que l’on subit de la part de ses anciens compagnons idéologiques,
Au sujet de ces trahisons. Il y a tant de gens dans cette famille politique nationale-libérale, dont je fais partie et dont je ferai toujours partie. J’ai été exclu [du FPÖ], et nombreux sont ceux qui sont encore très déçus aujourd’hui que j’aie été traité de la sorte.
Magyar Jelen: Depuis que vous avez été contraint de quitter la haute politique en 2019, le monde a beaucoup changé, et probablement comme jamais auparavant. Il y a eu le Covid. Maintenant, nous avons cette guerre en Ukraine. Vous qui avait été acteur en politique pendant tant d’années, comment avez-vous appréhendé ces grands évènements mondiaux?
Heinz-Christian Strache : On dit chez nous que « L’Autriche est le petit monde où on teste le grand monde ». Et j’ai certainement gêné certains acteurs politiques, non seulement en Autriche, mais au-delà des frontières autrichiennes, au sein de l’Union européenne. C’est pourquoi on a comploté contre moi pendant des années afin de m’éliminer, entre autres, avec le guet-apens d’Ibiza, mais aussi avec d’autres pièges. Avec ce coup d’État dirigé contre ma personne, on a finalement également renversé un gouvernement qui travaillait bien.
On a aussi affaibli la forte opposition nationale-libérale que j’avais bâtie en Europe. Et la voie fut alors libre en Autriche pour de nombreuses mesures catastrophiques, comme lors du Covid, mais aussi par la violation de notre neutralité à laquelle nous assistons actuellement [NDLR : au sortir de la Seconde Guerre mondiale, l’Autriche est occupée, et devient officiellement neutre, ce qui est l’une des conditions pour la fin de l’occupation de la partie orientale de son territoire par l’URSS en 1955. Jusqu’à aujourd’hui, l’Autriche est encore officiellement neutre, et n’est ainsi pas membre de l’OTAN.]
Cela signifie que depuis ma chute et la chute du gouvernement qui fonctionnait bien à l’époque, la liberté, l’autodétermination du peuple ont diminué. On a balayé l’économie et les questions sociales. Et avec le conflit actuel en Ukraine et la guerre, on ne respecte [même] plus la neutralité autrichienne. Entre-temps, il y a eu une nouvelle vague dramatique de réfugiés, contre laquelle on n’a rien fait. C’est pourquoi beaucoup de gens regrettent le gouvernement de l’époque.
Aujourd’hui, il faudrait une initiative de paix européenne. Et c’est pour cela que j’essaie de forger des alliances et des partenariats au niveau européen. Au lieu d’une escalade de la guerre, il faut revenir à la table des négociations !
Pour lire la suite, c’est ici !