Après des mois de tensions et de tractations diplomatiques, le conflit armé tant redouté a éclaté dans la nuit de mercredi à jeudi. C’est peu avant 6 heures du matin à Moscou (4 heures à Paris) que la terrible sentence est tombée lors d’une allocution télévisée du président russe. « J’ai pris la décision d’une opération militaire » a ainsi déclaré Vladimir Poutine. Une annonce qui plonge le monde dans l’effroi et claque comme une gifle portée au visage du président français, Emmanuel Macron, qui avait prétendu être parvenu à faire « baisser la tension » lors de sa rencontre avec le maître du Kremlin.
Dans son intervention, ce dernier a dénoncé une fois encore un « génocide » orchestré par l’Ukraine dans l’est du pays ainsi que la politique agressive de l’Otan. Il a également assuré ne pas vouloir « d’occupation » de l’Ukraine, mais sa « démilitarisation » et sa « dénazification » (sic), promettant le tribunal pour « tous ceux qui ont commis de nombreux crimes, responsables de l’effusion de sang de civils, notamment des citoyens russes ». Pris de court par le coup de force russe, les dirigeants occidentaux se sont pour l’instant contentés de « condamner fermement l’agression » et de promettre de nouvelles sanctions contre la Russie. « Le président Poutine essaie de revenir au temps de l’Empire russe, mais en agissant ainsi il met en péril l’avenir de son peuple », a déclaré pour sa part la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Une « réunion extraordinaire » au Conseil de l’Europe se tiendra ce jeudi pour prendre « rapidement les mesures nécessaires pour répondre à la situation actuelle ». Beaucoup de palabres et de doctes et sentencieuses proclamations en perspective et une lenteur de réaction concrète sur laquelle mise sans doute Vladimir Poutine.
Côté ukrainien
Côté ukrainien, le président Volodymyr Zelensky a donné l’ordre à ses troupes d’infliger le maximum de pertes aux militaires russes qui envahissent son pays, a indiqué le commandant en chef des forces armées ukrainiennes, le général Valery Zaloujni. Des explosions ont été entendues dans plusieurs villes dont la capitale Kiev, Kharkiv, deuxième ville du pays, Kramatorsk, Dniepr, Donetsk, mais aussi les cités portuaires de Marioupol et Odessa. L’attaque russe apparaît donc comme une opération de grande ampleur.
S’il est difficile de prévoir pour le moment toutes les conséquences de cette attaque, on frémit en imaginant une éventuelle intervention des Etats-Unis ou de l’Otan qui pourrait transformer le conflit régional en véritable tragédie mondiale. Une fois encore, on ne peut que regretter amèrement que l’Europe, empêtrée dans sa vassalité vis à vis des Etats-Unis et encombrée de moraline « droits de l’hommesque », n’ait pas joué son rôle de « troisième voie » permettant une conciliation et une sortie pacifique de la crise. Le prix à payer pour cette incurie pourrait, cette fois, être particulièrement lourd.
Xavier Eman
Article paru dans Présent daté du 24 février 2022