Jusqu’où ira se nicher le « wokisme », cette maladie sénile de la modernité consistant à traquer névrotiquement toute trace, surtout fantasmée, de « domination » (patriarcale, occidentale, blanche…) ou « d’appropriation culturelle ? La réponse est désormais connue : partout, jusque dans les ultimes recoins des domaines les plus improbables tels que les chaînes de restauration.
En effet, la chaîne de restaurants dédiés aux grillades « Buffalo Grill », fondée en 1980, a décidé d’abandonner l’ambiance « western » qui était jusque-là sa spécificité. Après 41 ans d’existence, fini le décorum « cowboys et Indiens » inspiré des westerns hollywoodiens, place à un nouveau logo et un nouvel univers : « American BBQ ». La chaîne promet désormais une ambiance plus « cosy et moderne » sans toutefois modifier les produits stars de Buffalo Grill auxquels les plus fidèles clients sont attachés.
Ainsi, sur une vidéo postée sur les réseaux sociaux, on peut voir un serveur Buffalo Grill en train de retirer de son restaurant une énorme statue de bison sous l’œil attristé d’un « vrai » Indien d’Amérique. « Bye Bye les cowboys et les Indiens », précise l’agence, et d’ajouter que « Buffalo Grill se réinvente en House of BBQ ». Une restructuration qui devrait coûter près de 80 millions d’euros.
Si la raison officielle mise en avant par la direction de la chaîne est la « modernisation » et le « renouvellement » de l’image de la société, de nombreux observateurs y voient également la marque de l’influence de l’idéologie « woke » qui sévit de plus en plus dans tous les secteurs de la société. L’utilisation à des fins commerciales de l’image des « Indiens », peuple natif d’Amérique, par des employés non issus de cette minorité serait en effet « offensante » pour celle-ci. La « tragédie indienne » ne serait pas propice à une « récupération » dans un lieu de détente et de loisirs tel qu’un restaurant populaire. Cet argumentaire aurait sans doute paru risible voire totalement délirant il y a quelques années mais il est hélas aujourd’hui pris très au sérieux, notamment dans le commerce où de plus en plus d’enseignes craignent de provoquer l’ire de telle ou telle association de défense des « intérêts » d’une quelconque minorité, forcément souffrante, et de se voir boycottées voir traînées en justice. Bienvenue en Absurdistan, système à visée totalitaire où règnent la peur et la surveillance permanente au nom de l’amélioration morale de l’humanité. De quoi sérieusement nous couper l’appétit.
Xavier Eman
Article paru dans Présent daté du 24 novembre 2021