Régionales 2021 – Pourquoi la Corse ne s’est pas abstenue? Entretien avec Paul-François Paoli

25 juin 2021 | France, Politique

Avec un taux d’abstention record de 66,7%, le premier tour des élections régionales 2021 devient le scrutin le plus boudé sous la cinquième République. Une région se distingue: la Corse où le taux d’abstention a été bien plus bas (42,92%).

L’essayiste Paul-François Paoli y voit la manifestation de la passion politique des Corses qui, à travers leur vote, expriment la défense de leur insularité. La collectivité territoriale corse n’est pas perçue comme une entité administrative abstraite, mais comme une instance destinée à préserver leur identité.

Causeur. Pourquoi la mobilisation électorale a-t-elle été au rendez-vous sur l’île de Beauté ?

Paul-François Paoli. Il y a sans doute plusieurs raisons. La première est que les Corses aiment depuis toujours la politique. Ils aiment débattre et discuter politique notamment en famille. En Corse, la politique y est très personnalisée. On vote parfois plus pour un homme que pour un parti. C’est un petit pays où chacun se juge et se jauge. La réputation personnelle d’un candidat, sa compétence et son intégrité jouent aussi parfois plus que son idéologie politique. Au-delà de cette attitude traditionnelle, si les Corses se sont massivement déplacés, c’est qu’ils se sentent concernés par des élections qui traitent de questions locales très concrètes. En primant leurs listes nationalistes, ils ont rappelé qu’ils ne s’identifient pas aux élites “hors-sols” de Paris. La Corse est l’expression même du clivage entre Anywhere et Somewhere mis en évidence par l’anglais David Goodhart. Les Corses sont attachés aux hommes politiques pour qui ils votent et qu’ils connaissent parfois personnellement – ou du moins croient connaître !

Les Corses ont l’impression que la France est à la dérive: dérive migratoire, dérive des mœurs avec la vague de l’antispécisme, du féminisme radical ou de l’arrogance du lobby gay…

Si les Corses sont allés massivement voter dimanche (57%), n’est-ce pas surtout lié au statut particulier de la collectivité territoriale et aux pouvoirs élargis du président de l’exécutif, capable de peser plus sur le destin de l’île ?

Sûrement. S’il n’y a pas eu cette désaffection massive qui a marqué le premier tour sur le continent, c’est donc parce que le vote dans un sens ou dans un autre est censé avoir des conséquences concrètes dans la vie locale des Corses. Par ailleurs, la forte mobilisation en faveur de Gilles Simeoni n’est pas un hasard. Simeoni jouit d’une excellente réputation. Maîtrisant parfaitement l’art oratoire, c’est un tribun qui a du charisme. C’est très important en Corse où il faut savoir s’imposer par la parole. Enfin il est capable de rassembler des électeurs qui ne font pas partie de son camp politique grâce à son intégrité incontestable, une qualité précieuse sur une île où l’emprise de la mafia est importante, si l’on en croit les experts.

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