Depuis vendredi, élus de tous bords, professionnels de l’« antiracisme » et autres grands médias n’en finissent plus de hurler au scandale ni de déverser leur bile sur les journalistes de Valeurs actuelles. Leur « crime » ? Avoir osé représenter le député racialiste et indigéniste Danièle Obono (LFI) en victime de la traite négrière dans un roman fiction se déroulant en Afrique au XVIIIe siècle. En réalité, un prétexte. Car ce que ne pardonnent pas les « bonnes consciences » de notre pays à nos confrères, c’est surtout d’avoir osé toucher à un tabou : celui de l’écrasante responsabilité des Africains eux-mêmes dans la traite des Noirs.
Rappelons d’abord que cette fiction, au texte et aux illustrations nullement racistes, s’inscrivait dans une série d’été proposant de plonger une personnalité contemporaine dans une période du passé. C’est ainsi que, avant Obono, Zemmour avait été projeté en pleine bataille de Waterloo et Didier Raoult dans les tranchées de 14-18… Bref, une idée plutôt amusante et, surtout, comme l’a souligné Tugdual Denis, directeur adjoint de la rédaction de Valeurs actuelles, dénuée de toute malveillance et de méchanceté. Mais, dans un pays où il n’est permis d’évoquer la traite que pour se flageller et dénoncer le prétendu « passé criminel » des Français blancs, cette initiative a évidemment suscité un tollé général immédiat. De Roussel (PCF) à Saint-Just (RN), en passant par Mélenchon (LFI), Ferrand (LREM), Abad (LR), Castex, Darmanin, ou encore Dupond-Moretti, chacun y est allé de sa condamnation plus ou moins violente. Et les mêmes qui, hier encore, riaient aux éclats devant les caricatures de Plantu représentant Le Pen en uniforme nazi se sont subitement indignés devant cette « représentation abjecte d’une élue de la République ». Mieux : Macron lui-même, que l’on pensait accaparé par des sujets plus sérieux, s’est fendu d’un coup de téléphone à Obono pour lui exprimer son soutien.
La conséquence directe de ce déchaînement ? Des suprémacistes noirs de la Ligue de défense noire africaine se sont crus autorisés à s’introduire en force samedi soir dans les locaux de Valeurs actuelles pour y venger l’élue LFI… Laquelle, après avoir qualifié élégamment vendredi ce roman fiction de « merde raciste dans un torchon », a dit samedi réfléchir à intenter une action en justice contre Valeurs actuelles, en expliquant très sérieusement : « Aujourd’hui, j’ai mal à ma République, j’ai mal à ma France. » Une confidence pour le moins surprenante de la part d’une élue qui, en 2012, prenait fait et cause pour le groupe ZEP et sa chanson « Nique la France », au nom de… la « liberté d’expression » (cf. l’article de Caroline Parmentier, Présent du 27 juin 2017) ! Quoi qu’il en soit, devant le scandale suscité par sa fiction, la direction de Valeurs actuelles a cru bon de présenter à Obono des excuses officielles. Tout en précisant, et sans doute est-ce là son plus gros « péché », que cette histoire avait pour but de montrer une « terrible vérité que les indigénistes [dont Danièle Obono] ne veulent pas voir » : celle « des horreurs de l’esclavage organisé par des Africains au XVIIIe siècle ». Un tabou que les tenants de l’histoire officielle falsifiée et autres adeptes de la repentance permanente ne pardonnent à personne de bousculer, comme l’a appris – entre autres – à ses dépens l’historien Olivier Pétré-Grenouilleau lors la publication de son livre il y a quelques années.
Franck Deletraz
Article paru dans Présent daté du 31 août 2020