Suède : l’identité au dessus de l’économie

20 septembre 2018 | Europe, Politique, Société

Pendant des jours les médias n’ont parlé que de ça, la menace en Suède d’une vague populiste.

La réalité, c’est que ça pousse. Aucun des deux grands blocs dominants de l’échiquier politique n’a obtenu la majorité face à une extrême droite qui progresse encore, quoique moins qu’elle n’espérait (17,6 % des voix, contre 12,9 % en 2014).

« Une chose est sûre, personne n’a obtenu de majorité. Il est donc naturel de lancer une collaboration entre les blocs », a déclaré devant ses partisans le Premier ministre sortant Stefan Löfven. Sa formation recueillerait de 25,4 % à 26,2 % des suffrages, en retrait de cinq points par rapport aux législatives de 2014, sanctionnée pour sa politique migratoire qui a vu l’arrivée en 2015 de 160 000 demandeurs d’asile, un record en Europe rapporté au nombre d’habitants.

Les sociaux-démocrates, auxquels appartient Stefan Lövfen, l’actuel Premier ministre, terminent en tête avec 28,1% des voix selon les dernières estimations, un “bas historique” observe le quotidien du soir Aftonbladet, rappelant que le parti descend sous les 30% pour la première fois en plus de cent ans. Les modérés dirigés par Ulf Kristersson perdent quant à eux plus de trois points par rapport aux législatives de 2014. Mais “l’éléphant dans la pièce” tel que le décrit le titre conservateur Svenska Dagbladet, c’est bien sûr la troisième place des Démocrates de Suède, la formation d’extrême-droite qui flirte avec les 18%. Bien au-delà de ses chiffres de 2014 mais en dessous des 20% rêvés par Jimmie Akesson, le chef de nationalistes.

Beaucoup craignaient un résultat encore plus fort”, commente Dagens Nyheter. “Mais le fait est que la Suède compte désormais un parti qui a ses racines dans le nazisme (…) Aujourd’hui, environ un cinquième de la population de l’un des pays les plus prospères du monde a choisi de voter pour ce parti. C’est aussi incompréhensible qu’indiscutable,” regrette le journal. Le leader des Démocrates de Suède Jimmie Åkesson a effectué un petit saut de joie face aux caméras, sous la clameur de la foule réunie dans une boîte de nuit du centre de Stockholm, avant d’annoncer : «Nous sommes les grands gagnants de cette élection ! […]. Nous allons exercer une véritable influence sur la politique suédoise.» Il a ensuite lancé une invitation personnelle au leader du parti des Modérés Ulf Kristersson afin de «discuter de la manière dont le pays sera désormais dirigé». Kristersson, lui, a préféré célébrer une victoire de l’Alliance de centre droit : «Le peuple suédois a choisi un nouveau Parlement, l’Alliance est plus forte que le gouvernement. Celui-ci n’aurait jamais dû exister, et il doit démissionner», a ainsi annoncé celui qui espère être le prochain Premier ministre. L’Alliance doit surtout son relatif succès à deux autres partis en son sein : les chrétiens-démocrates, avec 6,4%, mais surtout le parti du centre, qui effectue son meilleur score depuis près de 30 ans avec 8,6.

Tôt ou tard, comme c’est arrivé, progressivement au Danemark, en Norvège et en Finlande, une forme d’arrangement, allant d’une alliance parlementaire à une participation directe au gouvernement de la droite anti-système, pourrait être inévitable en Suède aussi.

La Suède qui a une économie saine vote pour les populistes et ne marche pas qu’à l’économie. Les Suédois veulent rester ce qu’ils sont et ont toujours été et luttent pour la préservation de leur identité historique.

Jean Bonnevey

Article paru dans Metamag daté du 14 septembre 2018

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