Caroline-Christa Bernard, membre d’une association de victimes du Bataclan et témoin des attentats du 13 novembre, s’oppose au concert de Médine au Bataclan et nous parle de la mobilisation qui enfle chaque jour. Avec désormais l’organisation d’une manifestation le 19 octobre devant la salle de concert.
— Le 13 novembre 2015, vous étiez dans l’immeuble du Bataclan, à 2 mètres de la salle de concert. Vous êtes aujourd’hui très en colère contre la venue du rappeur Médine au Bataclan qui se défend de soutenir le djihad. Qu’est-ce qui vous scandalise exactement ?
— Pendant 10 ans, j’ai habité dans l’immeuble de l’administration du Bataclan, à quelques mètres de la salle de concert. Le 13 novembre 2015, j’étais dans mon appartement lorsque les premières détonations ont retenti au pied de notre immeuble. Je suis descendue dans les bureaux de l’administration au rez-de-chaussée pour prendre des nouvelles de l’équipe. Toutes les lumières étaient allumées mais il n’y avait personne dans les bureaux à l’exception d’un homme mort sur le sol. Je suis alors sortie dans la rue pour chercher des secours mais c’était le chaos sur les trottoirs avec des corps allongés devant le théâtre du Bataclan, le bus des artistes criblé de balles, des mares de sang et les cris des personnes qui s’enfuyaient de la salle. La pizzeria située au pied de notre immeuble a servi d’hôpital d’urgence en accueillant de nombreux blessés. Et des victimes ont agonisé dans des cours d’immeubles avoisinant le Bataclan. Nous avons vu les images de ces cours d’immeubles ensanglantées où la majorité des victimes n’ont pas survécu malgré tous les soins prodigués par les habitants de ces immeubles, notamment les enfants qui ont porté secours aux victimes en apportant des verres d’eau et des produits de première nécessité.
Ce qui me scandalise d’abord à l’annonce des concerts de Médine au Bataclan, c’est que cela fait resurgir le souvenir des terribles souffrances endurées par les victimes. C’est aux victimes que je pense en premier, à toutes ces personnes qui ont tellement souffert le soir de l’attentat, à ces innocents qui ont été froidement abattus ou qui ont subi des actes de torture de la part des terroristes car nous savons aujourd’hui qu’il y a eu des égorgements, des éventrements et d’autres atrocités à l’intérieur du théâtre. Des victimes qui, de plus, ont été abandonnées par les autorités, les militaires en faction devant le Bataclan ayant refusé d’intervenir dans la salle de concert sur ordre de leur hiérarchie. La venue de Médine au Bataclan est à mes yeux une offense supplémentaire infligée aux victimes du 13 novembre 2015. Cette salle de concert a été le lieu d’un attentat islamique sanglant et il est indécent qu’un rappeur islamiste vienne y chanter des titres qui prônent le djihad, des « fatwas sur la tête des cons », la « crucifixion des laïcards comme à Golgotha », le port du voile islamique et la primauté du coran sur les lois de la République française.
— Parlez-nous de la campagne de mobilisation : pétitions, articles, réseaux sociaux, médias et mêmes représentants politiques. Riposte Laïque publie des articles tous les jours, Génération Identitaire a déployé une banderole devant la salle de concert. C’est organisé ou c’est en ordre dispersé ?
— C’est l’association « Génération Identitaire » qui s’est mobilisée en premier pour dénoncer la programmation du rappeur Médine au Bataclan en publiant très rapidement des vidéos d’information sur ce sujet sur Youtube. Ces vidéos sont très documentées puisque le parcours de Médine y est détaillé, notamment ses affinités avec la mouvance islamiste en France. Médine est à la fois un ami de Tariq Ramadan, des Frères musulmans et de la militante franco-algérienne Houria Bouteldja. L’information a ensuite été relayée massivement sur les réseaux sociaux. Les textes haineux, racistes et violents de Médine ont été diffusés sur Facebook et Twitter suscitant à la fois la colère et l’indignation des internautes. Les sites de ré-information comme Riposte Laïque et Résistance Républicaine se mobilisent également en publiant des articles sur ce scandale avec chaque jour des lecteurs de plus en plus nombreux. Aujourd’hui Patrick Jardin, le père de Nathalie qui travaillait comme éclairagiste au sein de l’équipe du Bataclan dans mon immeuble et qui est décédée le 13 novembre 2015, est désormais en première ligne de cette résistance pour exiger l’annulation des deux concerts de Médine. Patrick Jardin a saisi plusieurs avocats chargés du dossier et il lance un comité de soutien en vue de rassembler un maximum de personnes pour faire barrage à la venue de Médine au Bataclan.
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Propos recueillis par Caroline Parmentier
Article paru dans Présent daté du 24 août 2018