17/12/2015 – EUROPE (NOVOpress)
Bari, la capitale des Pouilles, a une longue expérience de l’accueil des frères migrants. C’était au centre d’identification et d’expulsion de Bari qu’avait d’abord séjourné Mada Adam Kabobo, le tueur à la pioche de Milan, après avoir débarqué dans les Pouilles à bord d’un bateau d’immigrés clandestins.
Depuis cet automne, par surcroît, « après l’appel du pape François qui a demandé d’accueillir les migrants dans les structures ecclésiastiques », de nombreuses paroisses de Bari se sont transformées en annexes pour clandestins. « À Bari, s’était alors félicitée l’adjointe au maire, Francesca Bottalico, il y a un réseau de solidarité des citoyens qui sont prêts à accueillir les migrants et à collaborer avec la mairie pour des projets d’intégration ».
Le 6 décembre, le pape François avait du reste fait l’éloge de l’Italie du Sud qui, en accueillant Kabobo et les autres, avait « été un exemple de solidarité pour le monde entier ».

L’abbé Angelo Cassano, l’ami des migrants
Tout n’est pourtant pas encore parfait à Bari, comme l’avait souligné en septembre l’abbé Angelo Cassano, un curé spécialisé dans l’accueil des clandestins. Tout en se réjouissant hautement des propos de François pour « réveiller le sens de la solidarité » dans la ville, il ne s’en disait pas moins « inquiet du niveau d’agressivité », qui se manifestait, à l’en croire, par « les agressions dans la rue contre les frères migrants, les nombreux, trop nombreux, petits épisodes d’intolérance raciale ».
L’ecclésiastique n’avait pas jugé bon d’évoquer la situation des chauffeurs de bus, qui sont en première ligne dans les échanges avec les immigrés. La mise en place, en 2009, d’une navette gratuite réservée à ces derniers entre le Cara (centre d’accueil pour les demandeurs d’asile) et la gare de Bari, n’a pas empêché les autobus et leurs chauffeurs d’être régulièrement pris pour cible.
Lors de la grande émeute de Bari en août 2011 – avec la participation de notre frère migrant Kabobo –, les clandestins avaient pris d’assaut un autobus, faisant de nombreux blessés. On avait échappé de peu à un massacre puisque les Africains allaient mettre le feu au véhicule, où se trouvaient encore le chauffeur et trois femmes, si un policier n’était courageusement intervenu tout seul pour les en empêcher.

Emeutes de clandestins à Bari, en 2011. La violence des clandestins à l’encontre de leur pays d’accueil n’est hélas pas une nouveauté
La litanie, depuis lors, est très longue. En décembre 2014, « deux Nord-Africains » s’étaient déchaînés à coups de pied et de poing contre un conducteur, auquel ils reprochaient de ne pas leur avoir ouvert la porte qu’ils voulaient. Ils lui avaient enfoncé les doigts dans les yeux et avaient tenté de les lui crever. Bilan : l’un des deux agresseurs s’était enfui, l’autre, « un Tunisien déjà connu des services de police », avait été arrêté, le chauffeur avait eu quinze jours d’ITT. Le journal local parlait alors « d’épisodes toujours plus fréquents » et citait un représentant syndical : « les chauffeurs vivent dans la terreur, surtout quand ils travaillent de nuit ». Le lendemain même, un autre chauffeur avait été passé à tabac par « un groupe de jeunes de couleur qui retournaient au centre d’accueil ».
Dernier épisode en date, il y a quelques jours, un conducteur a été agressé par un immigré qui réclamait des renseignements. « Le chauffeur, ne parvenant pas à comprendre ce que demandait l’individu, puisque celui-ci ne parlait pas l’italien, n’avait pu fournir les informations demandées ». Furieux, l’immigré s’est jeté sur lui et a tenté de l’étrangler.
Il est décidément urgent de donner aux chauffeurs de bus de Bari – et de toute l’Italie – une formation au bangala, au swahili, au kikongo, au wolof, etc., etc. Les paroisses pourraient peut-être organiser des cours du soir. Il est vrai que les chauffeurs de bus ne sont guère les bienvenus dans les églises italiennes, depuis que le pape François les a plus ou moins excommuniés pour racisme, dans un discours fameux – « Je me souviens de tant d’occasions ici à Rome, je montais dans l’autobus, quelques Tsiganes montaient, et le chauffeur disait : “Attention à vos portefeuilles”. Ça, c’est du mépris. C’est peut-être vrai, mais c’est du mépris. » Et n’avoir toujours pas appris la langue des frères migrants, ça aussi, c’est du mépris.
Flavien Blanchon