01/07/2015 – MONDE (NOVOpress)
La Grèce n’a donc pas remboursé, mardi, au FMI, le 1,5 milliard prévu, et n’a pas l’intention de le faire. Commentaire de notre ministre des Finances, Michel Sapin : « C’est sans grande conséquence. » Ah, bon ? Tout ça pour ça ! Ce terrible suspens entretenu par Bruxelles et la presse : la Grèce osera-t-elle faire défaut ? Les conséquences en seraient redoutables, quoiqu’encore inconnues, nous disait-on. Tout peut arriver, surtout le pire pour les Grecs. Finalement, non, ce n’est qu’une péripétie sans grand intérêt. Mme Lagarde, qui menaçait hier, n’a même pas fait les gros yeux aujourd’hui.
Michel Sapin a ajouté que le plus important, maintenant, c’est le référendum annoncé par Tsipras pour dire oui ou non aux propositions bruxelloises. Et la fausse dramatisation recommence. Selon que le oui ou le non l’emporte, la face de la Grèce, de l’Europe, du monde en seront changées ! La commission de Bruxelles, Junker en tête, est en campagne électorale, elle milite pour le oui et, bien entendu, menace en cas de non : Athènes sera bannie, chassée, excommuniée. Jean-Claude Junker a même eu l’audace de proposer de nouveaux crédits contre l’engagement signé d’Alexis Tsipras de se prononcer pour le oui, cela s’appelle du chantage.
Lui et les autres, Merkel, Hollande, qui se mêlent d’un scrutin dans un État souverain, veulent mettre le peuple grec sous tutelle politique après l’avoir mis sous son joug économique. Leur espoir, si le oui l’emporte ? Tsipras démissionnera, il y aura sans doute de nouvelles élections à la faveur desquelles libéraux et socialistes reviendront aux affaires et, comme avant, ils appliqueront les diktats européens. L’ordre bruxellois régnera de nouveau à Athènes.
On nous dit que la situation actuelle est due au jusqu’au-boutisme du Premier ministre. Certes, ce gauchiste n’est pas notre tasse de thé, qui veut reconquérir la souveraineté nationale piétinée par Bruxelles et la laisse bafouer par les immigrés, légaux et clandestins auxquels il ouvre les portes du pays. Mais la responsabilité principale incombe à l’Europe dès l’origine.
On savait dès le début que l’économie de la Grèce, sans industrie, ne pouvait lui permettre de rejoindre la CEE ancêtre de l’Union. La décision fut politique, il s’agissait de saluer le retour de ce pays dans le giron démocratique après la chute du « régime des colonels ». Et à ceux qui regimbaient, Giscard, alors aux affaires, lançait « On ne ferme pas la porte à Platon ! » De même, en 2004, le pays ne remplissait pas les conditions pour adhérer à l’euro. À Bruxelles, on a fermé les yeux sur les chiffres falsifiés présentés par Athènes prétendant que le déficit public était de 2,5 %, alors qu’en réalité il était de 4,3 %, et ainsi des autres critères. Mais on pensait que la dynamique européenne et la croissance effaceraient tout cela. Il n’en a rien été. C’est le rejet des remèdes cruels imposés par la troïka au peuple grec qui a conduit Tsipras au pouvoir. L’Union européenne récolte les fruits de son irresponsabilité.
Guy Rouvrais