N°111 de “La Décroissance” : une bouffée d’air frais – par Guillaume Le Carbonnel

15 juillet 2014 | Médias

15/072014 – PARIS (NOVOpress)
Le numéro 111 du journal La Décroissance (numéro double juillet/août) vient de paraître. Autant le dire tout de suite, il s’agit là d’une véritable bouffée d’air frais. Le mensuel, dirigé par Vincent Cheynet, en est à sa dixième année d’existence et a su garder un ton et une approche critique totalement vivifiante. Cheynet a fait paraître en mars dernier un petit opuscule intitulé Décroissance ou décadence(1) dans lequel il revenait sur tous les thèmes liés à l’hybris (la démesure) que nous connaissons actuellement. S’il ne peut être raisonnablement classé parmi nos amis, Cheney, en homme soucieux du débat, n’a pas jugé utile de cracher sur Alain de Benoist, ce qui n’est déjà pas si mal. Par ailleurs, il se montre admirateur de Jean-Claude Michéa ce qui n’est pas pour nous déplaire. Bref, le bonhomme mérite qu’on s’y attarde.

Cette livraison d’été de La Décroissance est admirable en tous points. La “Une”, « Géants d’hier, néant d’aujourd’hui » annonce la couleur. Il s’agit de dresser un constat impitoyable : l’absence totale de véritables pensées critiques au cœur de la société médiatique. « Chaque société a les philosophes qu’elle mérite. La société de consommation a BHL, Luc Ferry, André Glucksmann, Jacques Attali, André Comte-Sponville, Pascal Bruckner, Elisabeth Badinter, Dominique Volton, Michel Serres, Eric Fassin, Caroline Fourest et j’en passe de l’innombrable meute des chiens de garde », écrit Vincent Cheynet. Dans son papier intitulé « De Georges Orwell à Luc Ferry », Cheney revient sur la publication par l’ancien ministre de l’Education nationale de deux ouvrages sur l’écologie, domaine dont les médias l’ont étrangement proclamé « spécialiste ». Ferry y défend une certaine forme de résignation, expliquant qu’il n’y a pas qu’autre choix que la voie du capitalisme, du productivisme et estime que l’innovation seule sauvera le monde. Cheynet démonte une à une les thèses fumeuses de ce « poseur pour médias libéraux » qu’il resitue comme créature « d’un système dont il n’est que le récitant ». « Sa fonction est de rassurer le bourgeois dans son conformisme », ajoute t-il.

De son côté, Bruno Clémentin, dans l’éditorial, nous rappelle que la manipulation des masses est toujours à l’œuvre. Pour preuve, les sujets en sciences économiques et sociales du « bacho » version 2014 : « Les facteurs travail et capital sont-ils les seules sources de la croissance économique ? » ou bien « Comment la flexibilité du marché du travail peut-elle réduire le chômage ? » ou encore « A quels risques économiques peuvent s’exposer les pays qui mènent une politique protectionniste ? ». A bon entendeur…

L’« écotartufette » du mois n’est autre que Mélanie Laurent, actrice et réalisatrice, qui s’est mise en tête de produire, avec Cyril Dion du mouvement des Colibris(2), un film sur « des hommes et femmes (qui) inventent un autre monde qui respecte la nature et les humains ». Ou comment l’égérie de Dior tombe dans le pathos bobo du capitalisme vert.

Tout serait à citer dans ce nouveau numéro de La Décroissance. A ceux qui croiraient encore que le Front de Gauche ou le Front National sont des partis anti-système, le journal n’oublie pas de rappeler les « petites phrases » productivistes des uns et des autres. Salutaire pour qui revendique le droit de ne jamais idolâtrer qui que ce soit.

La chronique « Simplicité volontaire » lance quelques pistes de dissidences possibles avec le portrait de François et sa compagnie de cirque ambulant. Les BD ne sont pas en reste avec notamment Baballe de Colloghan, satire de la coupe de monde de football, absolument hilarante.

Qui dit numéro double, dit double numéro. Outre les pages habituelles, la livraison d’été nous offre un cahier central sur les précurseurs de la décroissance. Quinze pages qui dressent le portrait de penseurs emblématiques de la critique de la démesure. Cela va de Georges Bernanos à Gandhi, en passant par Bernard Charbonneau, Georges Orwell, Jacques Ellul, Christopher Lasch ou encore Cornelius Castoriadis. D’excellentes bases de départ pour découvrir des œuvres fécondes et vraiment radicales. Ces portraits sont à rapprocher de la collection Les précurseurs de la décroissance dirigée par Serge Latouche aux éditions du Passager clandestin(3). Dix titres sont déjà parus avec entre autre deux nouveautés, Pierre Kropotkine et Lao-Tseu. Là aussi, des indispensables qui permettent d’entrer en dissidence avec la marchandisation du monde.

Vous l’aurez compris, le journal La décroissance est une lecture obligatoire pour tout identitaire qui désire tout autant proposer que s’opposer. Un autre monde reste à inventer et il nous appartient dès à présent de poser les jalons de cette société alternative. Le mouvement décroissant est probablement aujourd’hui le bouillonnement le plus novateur et le plus révolutionnaire qui soit en matière de projets de sociétés futures. Nous ne pouvons nous en tenir à l’écart.

Le 1er septembre prochain, l’équipe de rédaction de La décroissance préparera l’expédition du numéro 112 avec « fromage et jus de fruits » au 52 rue Crillon, 6e, métro Masséna à Lyon entre 14 heures et 20 heures. « Venez nous aider », demande t-elle ! Nul doute que des identitaires lyonnais, et ils sont nombreux, répondront présents !

Guillaume Le Carbonel

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Notes :
1) Décroissance ou décadence, Vincent Cheynet, Le pas de côté, 2014.
2) Créé en 2007 sous l’impulsion de Pierre Rabbi.
3) Le Passager clandestin, 1 rue de l’église, 72240 Neuvy-en-Champagne.

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