Quand la Russie s’approprie historiquement l’Ukraine – Par Pascal Lassalle

23 février 2014 | Europe, Politique

23/04/2013 – KIEV (NOVOpress)
La Russie; comme l’ont montré les derniers événements, considère que l’Ukraine fait partie de son orbite, opérant même une récupération historique. Ce qu’a expliqué sur les réseaux sociaux Pascal Lassalle. Historien et conférencier, il a collaboré à Novopress, il est également directeur d’un Libre Journal des lycéens sur Radio Courtoisie et animateur du Cercle Georges Sorel (Réseau M.A.S.). Connaisseur de l’Ukraine, il nous a autorisé à reproduire le texte ci-dessous, issu d’un échange sur les réseaux sociaux.


La Russie est véritablement née dans la région de Vladimir-Souzdal et Moscou a été créée en 1147, d’une ethnogénèse entre colons slaves orientaux et populations finno-ougriennes (cf. le visage botoxé de Poutine).

Les Russes se sont attribués exclusivement un héritage commun à tous les Slaves de l’Est, celui de la Rou’s/Ruthénie de Kiev (et non Russie de Kiev, une mauvaise traduction qui arrange beaucoup de monde), ce qui revient à nier, dans tous leurs schémas historiographiques, qu’ils soient tsaristes ou soviétiques, toute identité singulière aux deux autres branches, les Bélarussiens (le terme Biélorusses n’est là aussi pas neutre) et les Ukrainiens.

Une sorte de captation d’héritage pour un “petit-frère” qui est devenu grand (merci au modèle autocratique et patrimonial de la Horde d’or, d’une redoutable efficacité administrative et militaire). Dire que Kiev/Kyiv est, selon la formule consacrée, la “mère des villes russes” (en fait ruthènes , vous avez compris), c’est comme si un Napoléon Ier qui aurait pérennisé son empire avait bâti un schéma historiographique affirmant au nom de notre latinité, que Rome était la mère des villes françaises et l’Italie le berceau de la France.

Ces schémas partagés par les élites et la population russe (un peu comme la vision jacobine dans la classe politique française) expliquent largement les relations spéciales et passionnelles (pour les “amicales et fraternelles”, selon la logomachie soviétique, on repassera) que Moscou entretient toujours avec son voisin “petit-russien”.

Ce n’est donc pas uniquement pour des raisons économiques, énergétiques et géostratégiques que le Kremlin a accepté, mi-décembre 2013, de débloquer 15 milliards de dollars en eurobonds, une somme considérable qui, dans un contexte économique domestique difficile, n’était pas destinée à être redistribuée aux citoyens de la Fédérations de Russie.

Ne pas comprendre cela nous condamne à appréhender partiellement et partialement la tragédie en cours, le énième épisode d’une mauvaise série dramatique qui se prolonge, pour le plus grand bonheur du producteur hollywoodien.

Crédit photo : Damien Rieu


Pour en savoir plus :
– Iaroslav Lebedysnky: Ukraine, une histoire en questions, L’Hamattan, 2008.

– Andreas Kappeler: Petite histoire de l’Ukraine, Institut d’études slaves, Paris, 1997.

Entretien avec Alexandre Douguine sur l’Ukraine (commenté par Pascal Lassalle).

– Iaroslav Lebedysnky, “L’empire médiéval de Kiev, débats historiques d’hier et d’aujourd’hui”.

– Daniel Beauvois, “Deux ‘prétendants’ historiques à la domination de l’Ukraine”.

Sans oublier plusieurs articles de Pascal Lassalle sur le site Europe Maxima et les émissions sur ce thème sur Méridien Zéro.

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