07/10/2014 – 14h45
STRASBOURG (NOVOpress) – Depuis son accession à la tête du Front National, Marine Le Pen s’est employée à mettre en œuvre le renouvellement de l’image de son parti, mais aussi le rajeunissement des cadres et des candidats du parti. Parmi la myriade de jeunes apparus, l’Alsacienne Julia Abraham – candidate aux élections municipales de Strasbourg en deuxième position sur la liste Strasbourg Bleu Marine – semble faire partie des figures qui constitueront le Front National de demain. Entretien sans tabous avec la jeune candidate de 21 ans qui fait déjà figure de vieille routière de la politique locale.
Julia Abraham, vous êtes l’une des nouvelles figures du Front National. Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
J.A. : J’ai 21 ans et suis actuellement en Master d’allemand, et je prépare les concours de l’enseignement. J’ai commencé à militer pour le Front National à l’âge de 15 ans en distribuant des tracts dans la cour du collège, et j’ai adhéré à l’âge de 18 ans. Je suis une « enfant du Front National » car mes parents se sont rencontrés lors d’un meeting de Jean-Marie Le Pen en Alsace à la fin des années 80.
J’ai fait mes premières armes lors des élections cantonales de mars 2011, où je suis parvenue au second tour dans le canton de Guebwiller au cours duquel j’ai rassemblé près de 40% des suffrages. J’ai par la suite été candidate dans la 2ème circonscription du Haut-Rhin aux élections législatives, puis à l’élection cantonale partielle de Munster.
Avec les élections municipales, j’entame donc ma quatrième campagne électorale. Je serai cette fois-ci candidate à Strasbourg, où je réside en raison de mes études, en deuxième position sur la liste conduite par Jean-Luc Schaffhauser.

Janvier 2013, Julia Abraham à la Manif pour Tous. Pour rappel, la sénatrice et candidate de l’UMP à la mairie de Strasbourg, Fabienne Keller, a voté le Mariage pour Tous lors du vote au Sénat.
Justement, le FN a récemment connu quelques mouvements à Strasbourg, avec une tête de liste inattendue. Qui est Jean-Luc Schaffhauser ?
J.A. : Le ralliement de Jean-Luc Schaffhauser au Rassemblement Bleu Marine est emblématique de l’évolution des lignes idéologiques et du retournement de certaines élites : ancien proche collaborateur de Marcel Rudloff (maire de Strasbourg et homme fort de la vie politique alsacienne dans les années 1980), ayant également travaillé comme consultant dans le secteur privé, européen convaincu partisan de l’axe « Paris-Berlin-Moscou » ayant soutenu la construction européenne, il s’est rapproché il y a quelques années de Marine Le Pen, constatant l’impossibilité de changer le système de l’intérieur, l’échec du système libéral et les effroyables dérives de l’Union Européenne. Fort de ses réseaux et de son expérience, sa candidature est une véritable chance pour notre mouvement et pour Strasbourg.
Quel score ambitionnez-vous pour Strasbourg ?
J.A. : Notre objectif premier est de nous qualifier pour le second tour, ce qui nécessite 10% des suffrages exprimés au premier tour, et donc de pouvoir faire notre retour au Conseil municipal de Strasbourg. Nous n’avons pas d’objectif plafond : nous voulons rassembler un maximum de Strasbourgeois autour de notre projet et de notre liste pour obtenir le plus d’élus possibles.
Il est indispensable que nous reprenions pied à Strasbourg où les dérives de la gestion UMPS de la ville et de la communauté urbaine ne souffrent plus d’une opposition réelle depuis trop longtemps.
Quel seront votre programme et vos principaux axes de campagne pour Strasbourg ?
J.A. : En tant que femme, la première de mes préoccupations est la sécurité de toutes et de tous. Cette année comme à l’accoutumée, le réveillon a été le théâtre à Strasbourg de scènes de guerre civile, où l’on a vu des « jeunes » tendre des guet-apens à des pompiers pour les caillasser, voire les viser avec des tirs tendus de mortiers.
Je suis également choquée par le climat d’incivilité et d’agressivité de certains « jeunes » à l’égard des femmes dès que l’on s’éloigne des rues pavées du centre-ville. Des zones périphériques entières de la ville ont été abandonnées depuis des décennies à la petite et à la grande délinquance, et il me semble urgent de redonner la sécurité – première des libertés – à tous les Strasbourgeois, ce qui passe par le recrutement de policiers municipaux, non pour harceler les automobilistes mais pour protéger l’ensemble de nos concitoyens. En clair, je ne veux pas que Strasbourg devienne Marseille.

Entretien – Julia Abraham, 2ème de liste FN à Strasbourg : « Je ne veux pas que Strasbourg devienne Marseille »
De nombreux points relatifs aux questions budgétaires sont également à revoir. Cette année encore, les impôts locaux ont davantage augmenté à Strasbourg que dans les autres grandes villes de France, ce qui s’explique diverses gabegies : non seulement par une mauvaise gestion des personnels de la Communauté Urbaine qui a été pointée du doigt par la Chambre régionale des comptes, mais aussi de nombreuses subventions communautaristes.
Certaines dépenses effectuées sont invraisemblables : c’est ainsi que l’argent public a financé – avec nos impôts – pour plus de 30 millions d’euros la construction de pavillons pour les gens du voyage, et ceci pour seulement cinquante familles, le tout mis à leur disposition exclusive pour un loyer d’en moyenne 60 euros mensuels charges incluses, tandis que de nombreux Strasbourgeois attendent des années pour obtenir un logement social et peinent à boucler leurs fins de mois.
Le coût du transport représente également une problématique pour de nombreux strasbourgeois, avec un prix du ticket unitaire démesurément élevé à 1,60 € (à peine moins élevé que le prix du ticket de métro parisien à 1,70 €). Il est indispensable de diminuer le coût du transport afin de le rendre accessible à tous : cela pourra se faire grâce aux économies sur les dépenses inutiles ou clientélistes qui ont été effectuées depuis trop longtemps.
Enfin, puisque nous sommes à Strasbourg, ville hautement symbolique où siègent plusieurs institutions européennes (le Parlement Européen, mais aussi le Conseil de l’Europe), nous nous devons également de proposer un projet européen alternatif à l’Union Européenne, cet hydre aussi envahissante dans la détermination du taux de lait cru des fromages produits du fin fond de la Bulgarie qu’impuissante à faire de l’Europe une zone respectée et capable de parler d’une voix indépendante de celle des États-Unis.
De façon globale, nous devons être en mesure de démontrer à nos concitoyens que le FN, et plus particulièrement le Rassemblement Bleu Marine qui comme son nom l’indique est un Rassemblement plus large que l’électorat traditionnel du FN, est en mesure d’apporter un plus extrêmement bénéfique à la bonne gestion d’une commune, en cessant les dépenses fantaisistes et en recentrant les efforts de l’équipe municipale sur le pouvoir d’achat (ce qui passe par une réduction des impôts), la sécurité, la tranquillité et les initiatives favorisant le développement de l’emploi.
Le FN est souvent critiqué pour son manque d’implantation locale. Qu’avez-vous à dire à ce sujet ?
J.A. : Le Front National a souvent fait l’objet de critiques en raison de la relative faiblesse de son implantation locale. Je souhaiterais toutefois rappeler que l’une des raisons majeures de cette faiblesse est le fait des modes de scrutins iniques qui régissent les élections en France, où le scrutin majoritaire a jusqu’à présent très fortement favorisé l’UMP et le PS, et leurs alliés dociles. Rappelez-vous à titre d’exemple qu’en 2007, François Bayrou a réuni 18% des voix à la présidentielle mais que son parti n’a obtenu que 3 députés aux législatives qui ont suivi.
Nous sommes toutefois en passe de parvenir à surmonter notre déficit d’implantation locale, puisque le FN s’apprête à présenter 700 listes aux municipales, ce qui est inédit. Marine Le Pen, en plus de s’efforcer de rendre crédible et audible son programme national, a parfaitement conscience de l’importance des élections municipales et pousse de toutes ses forces pour que notre ancrage local se renforce.
Je veux aussi ajouter qu’il ne tient qu’à chacun d’entre nous de se mobiliser à l’échelle de sa ville et de pallier à cette faiblesse, tout particulièrement à l’occasion des élections municipales à venir, et qu’il ne faut jamais lâcher prise : aucune barrière n’est infranchissable, y compris celle du scrutin majoritaire à deux tours, comme l’a montré l’élection de Brignoles.
Quels enseignements tirez-vous de la victoire du FN à l’élection cantonale partielle de Brignoles de l’automne dernier ?
J.A. : Cette élection partielle montre tout d’abord que le FN a considérablement progressé en 2013 : là où en 2012 nous n’étions séparés que de quelques voix dans un duel face au PCF, nous l’avons largement emporté dans un duel face à l’UMP, ce qui est hautement significatif.
La classe politique et les médias ont donné une dimension nationale à ce qui n’a certes été qu’une élection cantonale partielle. Le retentissement de cette élection a eu, pour l’illustrer de façon imagée, l’effet de la « potion magique » sur la tribu gauloise d’Astérix : depuis la victoire de Laurent Lopez, nous connaissons une nouvelle augmentation des adhésions au FN, la mobilisation militante s’est accrue et de nouvelles vocations pour conduire des listes aux municipales ont émergé, car désormais chacun a le sentiment que la victoire – y compris au scrutin majoritaire – est possible.
Un dernier mot pour nos lecteurs ?
J.A. : Nous sentons tous, de façon claire ou confuse, que nous arrivons à la fin d’une époque et que nous allons probablement entrer dans une ère aussi ardue que passionnante. Le capitalisme mondialisé, qui semble avoir triomphé par K.O. de tous ses adversaires, qui est doté de moyens technologiques sans précédent et a enfanté une hyperclasse mondiale pleine aux as et entièrement dévouée à propager son modèle (ainsi qu’à traquer ses opposants) est un géant aux pieds d’argile que nous pouvons renverser.
Il serait toutefois hautement illusoire de penser que nous pourrons nous sauver individuellement, en espérant passer dans notre petit coin au travers des mailles très serrées du filet de l’esclavage économique et intellectuel auquel nous destinent les élites mondialistes qui nous dirigent.
Se tenir écarté de la mêlée ne nous sauvera ni individuellement ni collectivement : la domination actuelle du capitalisme mondialisé peut très bien – malgré ses graves contradictions internes – se maintenir et s’affermir, ou bien son effondrement peut également se faire sans nous et ne pas avoir d’incidence sur la sortie de l’Histoire de la France et de la civilisation européenne que nous sommes en train de vivre mais à laquelle il est encore, je le crois profondément, possible de remédier. C’est pourquoi, à mon modeste niveau, je me suis engagée dans l’arène électorale, et que j’invite chacun des lecteurs à devenir des acteurs engagés de la reconquête des libertés qui nous ont été confisquées.
Crédit photo : DR Julia Abraham