Jean-Yves Le Drian : ministre de la Défense ou syndic de faillite de l’armée française ?

7 novembre 2012 | France, Politique

07/11/2012 – 18h00
PARIS (NOVOpress Breizh) – Ministre de la Défense depuis le 16 mai dernier, Jean-Yves Le Drian (photo)  sera-t-il le syndic de faillite de l’armée française ? La lecture de l’article de Georges-Henri Bricet Desvallons publié par Polémia sous le titre “Armée française : la ruine en héritage ?” pourrait le laisser penser. L’auteur, docteur en science politique et spécialiste des questions de défense, établit en effet un constat sans complaisance de la situation économique et logistique des armées françaises qui, depuis leur professionnalisation en 1996, se paupérisent au fil des gouvernements successifs en moyens matériels et en effectifs.

« Il semble que la phase d’autodestruction de notre défense soit désormais irrémédiablement engagée. » Georges-Henri Bricet Desvallons ne mâche pas ses mots : « Coupes continues des crédits, purge massive des effectifs, cession gratuite du patrimoine immobilier, des milliers de militaires qui ne sont plus payés depuis des mois… La situation de la Défense est entrée dans une phase critique qui pourrait déboucher sur une crise sociale, capacitaire, et des vocations sans précédent historique. » affirme-t-il, estimant que « l’institution militaire sera vraisemblablement la principale victime de la politique ultra-récessive poursuivie par le gouvernement Ayrault, qui, en cela, ne fait que parachever les décisions prises sous le mandat de Nicolas Sarkozy. L’armée de terre sera la plus touchée, mais la Marine et l’armée de l’air auront aussi leurs lots. »

Evénement significatif, des femmes de militaires se sont constituées récemment en groupe sur Facebook, sous l’appellation « Un paquet de gauloises en colère » afin de dénoncer le non paiement des soldes à leurs maris, militaires en opération extérieure. Devant ce mouvement, Jean-Yves Le Drian a dû annoncer le 29 octobre dernier le déblocage de 30 millions d’euros « pour régler les erreurs de paiement des soldes de militaires qui s’accumulent depuis plus d’un an à cause d’un nouveau logiciel de traitement. »

M.Bricet Desvallons évoque également les graves difficultés de trésorerie  rencontrées par les PME qui travaillent exclusivement pour la Défense, soumises à des délais de paiement qui vont de 9 à 18 mois, le bradage du patrimoine immobilier – des immeubles vont être cédé gratuitement à la Ville de Paris –, la politique de dépyramidage mise en place afin de réduire du tiers les volumes d’avancement des personnels militaires sur les trois prochaines années et la réduction continue des effectifs.

« Aucune des lois de programmation militaire décidées par les gouvernements de droite et de gauche, et qui sont pourtant censées fixer le cap stratégique des armées et sanctuariser les investissements budgétaires, si cruciaux pour maintenir un modèle d’armée cohérent, n’ont été respectées depuis la professionnalisation de 1996 », constate l’auteur, pour qui « l’horizon d’un tel processus est clair : un effondrement radical des moyens humains et matériels de nos forces, un format d’armée mexicaine (l’armée de terre compte actuellement 173 généraux en 1re section pour un effectif de moins de 110-120 000 hommes, là où le Marines Corps n’en recense que 81 pour un effectif quasi double de 220.000) avec une haute hiérarchie civile et militaire à peu près épargnée en raison de considérations politiques (puisque c’est elle qui exécute les réformes), un taux de disponibilité des matériels extrêmement faible, des forces incapables de se projeter hors des frontières et des programmes militaires vitaux qui ne pourront être pleinement financés (drones, renouvellement véhicules terrestres, développement d’une capacité de cyber-défense). »

Comment une si forte pression peut-elle être exercée par le pouvoir politique sur le budget de la Défense ? « Très simplement par le fait que l’armée est la seule institution publique à ne pouvoir compter sur un contrepouvoir syndical et que le politique se sent, en conséquence, autorisé à toutes les oukases», explique G.H. Bricet Desvallons. Et ce spécialiste de conclure : « Si le politique choisit la facilité et s’entête dans ce processus de désossage budgétaire de notre puissance militaire, et si le haut commandement n’y trouve rien à redire, il ne restera bientôt à nos forces, en lieu de drapeau et de fierté, que l’héritage de la ruine. » Acteur de premier plan de ce « désossage budgétaire », M. Le Drian, ministre de la Défense, sera-t-il le syndic de faillite de l’armée française ? Au train où vont les choses, c’est malheureusement aujourd’hui plus qu’une probabilité.

Crédit photo : Pymous via Wikimédia (cc)

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