Andrea Riccardi (photo), fondateur de la puissante communauté catho-conciliaire Sant’Egidio, est la caution morale du gouvernement Monti, au sein duquel il occupe le ministère de la Coopération internationale et de l’intégration. François Hollande, la semaine dernière, l’a nommé commandeur de la Légion d’honneur. Autant dire que Riccardi est comme Tartuffe de
Ces gens qui, par une âme à l’intérêt soumise,
Font de dévotion métier et marchandise,
Et veulent acheter crédit et dignités
À prix de faux clins d’yeux et d’élans affectés,
Comme Tartuffe, Riccardi a deux visages. Un visage généreux et humanitaire, pour les immigrés, de préférence clandestins. Après la régularisation masquée à laquelle il vient de procéder, le quotidien Libero a pu titrer ironiquement : « Comme il est bon Riccardi : 800.000 immigrés en plus ».
Si l’on vient pour me voir, je vais aux prisonniers
Des aumônes que j’ai partager les deniers.
il se vint l’autre jour accuser
D’avoir pris une puce en faisant sa prière,
Et de l’avoir tuée avec trop de colère.
Mais Riccardi sait aussi être impitoyable, avec les Italiens qui n’acceptent pas d’assez bon gré l’invasion de leur pays.
C’est à vous d’en sortir, vous qui parlez en maître:
La maison m’appartient, je le ferai connaître,
Monsieur, sans passion :
Ce n’est rien seulement qu’une sommation,
Un ordre de vuider d’ici, vous et les vôtres,
Mettre vos meubles hors, et faire place à d’autres,
Sans délai ni remise, ainsi que besoin est.
Juste dix jours après avoir lancé la régularisation de centaines de milliers de clandestins, Riccardi s’est rendu hier à la synagogue de Rome pour annoncer le durcissement de la censure contre « les sites Internet à contenu raciste, xénophobe et antisémite ».
« Je présenterai, a déclaré Riccardi, une proposition pour endiguer la haine raciale, ethnique, religieuse, antisémite, répandue au moyen d’Internet. Nous adopterons des mesures qui frappent tant ceux qui propagent ces messages que les visiteurs non occasionnels de ces sites. Je pense que nous arriverons aussi à la possibilité de bloquer ces sites web ».
« L’idée, a-t-il expliqué, est d’employer des instruments utilisés pour combattre d’autres délits sur Internet et qui ont démontré leur efficacité : cela permettrait à la police postale de bloquer les sites racistes et de poursuivre aussi le visiteur non occasionnel de ces pages honteuses ».
La porte, on le voit, sera ouverte à tous les arbitraires : quels seront les critères d’un site « raciste » ? À partir de quand est-on « visiteur non occasionnel » ? Avec un aplomb extraordinaire, Riccardi a justifié ces atteintes à la liberté individuelle par « l’attentat qui a eu lieu à Toulouse », et dont il s’est bien gardé de nommer le perpétrateur. Selon lui, « on ne peut se contenter de pleurer après chaque massacre et ensuite d’oublier ses larmes. Les larmes doivent devenir des engagements effectifs à lutter contre ceux qui sèment la haine, parce que la prédication du mépris et de la haine est gravissime et germe avec les années ».
Réagir à la tuerie de Mohamed Merah en fermant les sites Internet qui critiquent l’immigration, et, pour faire bonne mesure, en jetant en prison les Italiens qui les fréquentent, la logique est imparable.
Faut-il citer le dialogue de Dorine et de Madame Pernelle ?
– S’il le faut écouter et croire à ses maximes,
On ne peut faire rien qu’on ne fasse des crimes;
Car il contrôle tout, ce critique zélé.
– Et tout ce qu’il contrôle est fort bien contrôlé.
Ou plutôt celui de Dorine et d’Orgon ?
– Te tairas-tu, serpent, dont les traits effrontés…?
– Ah! vous êtes dévot, et vous vous emportez ?
– Oui, ma bile s’échauffe à toutes ces fadaises,
Et tout résolûment je veux que tu te taises.
La comédie de Tartuffe-Riccardi est en tout cas encore loin du dernier acte.
Flavien Blanchon pour Novopress