Le foot d’en haut, avec l’équipe de France et ses joueurs qui salissent le maillot, ne nous fait plus rêver.
Le foot d’en bas, avec des clubs de banlieue qui foutent le souk sur le terrain, nous fait carrément cauchemarder. Qu’on arrête de nous bassiner avec l’idée que le foot serait un formidable outil d’intégration ! La dernière finale de la coupe de l’Hérault en donne un nouveau démenti…
En juin, pour les moins de vingt ans, « examen » rime sou vent avec brevet des collèges ou baccalauréat. Mais pas toujours. Si, mercredi 27 juin, à Montpellier, sept jeunes ont été mis en examen, c’est pour… « violences volontaires en réunion » !
La réunion en question était un match de foot. Le 2 juin, sur le stade du petit village de La Peyrade, se disputait la finale de la coupe de l’Hérault des U17, catégorie réservée aux joueurs de moins de 17 ans. Elle opposait l’AS Béziers au club du Petit Bard, une cité de Montpellier, classée en « zone sensible ». Elle n’a duré qu’une mi-temps.
Juste avant la pause, quand Béziers a marqué un second but – portant le score à 2 à 0 –, les joueurs et certains supporteurs du Petit Bard ont levé le coude pour donner des coups, transformant le terrain de foot en ring de boxe. Le match a été arrêté, avec sur la touche cinq blessés: les trois arbitres et deux joueurs biterrois, qui ont joué les prolongations aux urgences de l’hosto. Le lendemain, dans le quotidien « Midi Libre », l’arbitre central, Morgan Bilât, qui débute dans la carrière, a raconté son calvaire: « Tout est parti comme une traînée de poudre. Ils m’ont pris le cou, puis m’ont traîné. Je me suis retrouvé plaqué au sol, et j’ai pris des coups au visage, surtout sur les pommettes. J’ai reçu des coups de pied au poignet, qui a enflé. »
Hélas, depuis, l’arbitre semble avoir avalé son sifflet. Contacté par « Minute », il a préféré ne pas sortir de carton rouge : « Une enquête est en cours. Je ne souhaite donc pas m’exprimer. Les arbitres ont une charte à respecter, j’ai un devoir de réserve. »
Après le match, les victimes ont cependant porté plainte et le parquet de Montpellier a engagé des poursuites. Contre sept joueurs et un… dirigeant, accusé d’avoir mis le feu aux poudres!
Le district de l’Hérault a déjà sanctionné les fautifs
En attendant que la justice fasse son œuvre, les instances sportives ont déjà sévi. Le 21 juin, la commission de discipline du district de l’Hérault s’est réunie.
« Minute » a consulté le procès-verbal de la réunion. Résumés en préambule, les faits sont accablants: « Attendu qu’à la 45e minute, M. Ouzin Omar, dirigeant du FC Petit Bard, est rentré sur l’aire de jeu pour contester et agresser verbalement l’arbitre central qui venait d’accorder un but en faveur de Béziers… Attendu que l’arbitre central a exclu M. Ouzin Omar, que celui-ci a quitté l’aire de jeu, qu’à ce moment-là des spectateurs ont envoyé un sac rempli de bouteilles sur l’aire de jeu et ont envahi le terrain… Attendu que les joueurs Y. Salah, O. Bilal et El D. Mohamed du FC Petit Bard ont agressé physiquement l’arbitre assistant… Attendu que les joueurs El D. Mohamed et D. Sofiane du FC Petit Bard ont agressé violemment des joueurs adverses… Attendu que des joueurs du FC Petit Bard ont participé à une échauffourée générale… » En conséquence, les sanctions sont tombées comme à Gravelotte. Le dirigeant Omar Ouzin a écopé d’une suspension de 4 ans; Salah, Bilal et Mohamed, modèles d’intégration sportive, sont suspendus pour une durée de 6 ans. Pour éviter toute entourloupe ultérieure, leurs licences ont été confisquées par le district. Les autres protagonistes de l’échauffourée se sont vu infliger de 5 à 10 matches de suspension.
Le FC Petit Bard porte les couleurs de l’USM Alger !
Pour le Petit Bard, ces sanctions sont un coup dur et nuisent à l’image qu’il veut donner. Car ce club de la banlieue de Montpellier est plein de bonnes intentions, affichées sur son site Internet: « Le FC Petit Bard de la ville de Montpellier a été fondé le 31 mai 1990 suite à la volonté de quelques habitants du quartier. Il s’est donné pour mission de faire partager des valeurs sociales à travers un sport, le football. » Il est rappelé que, dès l’origine, « l’objectif était de faire du socio sportif en améliorant le quotidien des jeunes et en les éduquant ». On applaudit à deux mains. En revanche, quand on apprend pourquoi le Petit Bard joue en « rouge et noir », on est moins enthousiaste: « Rouge et noir, telles sont aussi les couleurs de l’USM Alger (Union Sportive de la Médina d’Alger), créé en 1937 et plusieurs fois champion d’Algérie (5 titres). C’est surtout le club de cœur du premier président (M. Rachid Malla), originaire de Bejaïa. »
Faudrait quand même qu’on nous explique comment on peut espérer inculquer à de jeunes joueurs le respect de la République française en leur mettant sur le dos un maillot aux couleurs d’Alger…
Pierre Tanger