La faune et la flore introduites sont une menace pour la forêt indigène – Et les hommes ? [Tribune libre]

30 avril 2012 | Actualités, Environnement, Europe

Abandons ou négligences, grenouille taureau, frelon asiatique et tant d’autres, il semble évident aujourd’hui d’évoquer les dangers induits par la présence de trop d’ « étrangers », qui mettent en danger l’équilibre d’un milieu végétal ou animal donné. Tout ce qui touche notre environnement est un sujet sensible et il semblerait même anormal de ne pas chercher les moyens de remédier à ce type de problème, et bien sûr de s’en exprimer ouvertement. Au contraire, ceux qui se hasarderaient à dénoncer un phénomène comparable frappant notre biotope à nous, notre culture européenne, restent peu nombreux, même si la comparaison des situations semble tentante.

« Des experts luttent pour sauver notre écosystème, pour que nos forêts conservent leur authenticité et pour que tous ces problèmes ne gâtent pas nos vies à tous. C’est pour cela que nous tenons à publier à titre de comparaison un article d’un de ces experts, paru dans la presse le 14/04/2012, et qui tourne actuellement en Allemagne et en Autriche via Facebook ».

 

Le silence avant la chute

Une politique d’immigration ratée ; la pauvreté des seniors ; les conflits entre ceux qui ont des enfants et ceux qui n’en ont pas ; la fin du contrat social et de l’état providence : tel est le scénario de la révolte qui s’annonce.

L’idéologie postmoderne du multiculturalisme, comme alternative à l’état-nation homogène, a selon moi démontré son caractère d’impasse sociale et politique, d’utopie éloignée des réalités. Le difficile surpassement des cultures nationales a été entravé par l’accueil irréfléchi d’autres cultures et d’autres religions. Toutes les expériences acquises en ce domaine par les pays d’immigration traditionnels ont été avec constance déclarées nulles et non avenues, et on leurs a préférée une politique d’intégration la plupart du temps condamnée dès le début à l’échec. […]

La thèse brandie pendant des années qui affirmait qu’une immigration soutenue était nécessaire pour le maintien du niveau des retraites et des prestations sociales, n’était pas totalement erronée en théorie, mais s’est révélée être une illusion une fois appliquée à la réalité économique et sociale. Cette politique d’immigration ratée a pour conséquences l’appauvrissement d’une grande partie de la population, une lutte entre pauvres et riches, un conflit de générations entre les plus vieux et les plus jeunes, et globalement une dérive économique vers la médiocrité.

Le sociologue et spécialiste des migrations Herwig Birg (1) décrit cette évolution de la manière suivante:

« La principale conséquence des modifications démographiques est une augmentation extrêmes des différences sociales et le risque de conflits sociaux à cause de l’érosion du système social et des salaires en stagnation, voire à la baisse. Quatre lignes de conflit se révèlent: un conflit générationnel, un conflit régional, un conflit entre gens avec ou sans arrière plan migratoire, un conflit entre gens avec ou sans enfants. »

Le plus inquiétant dans tout cela, n’est pas seulement la diminution globale de la population, mais l’évolution diamétralement opposée entre une population âgée qui augmente fortement, et des classes d’âge plus jeunes devenant de plus en plus clairsemées, ce qui contribue à éroder les prestations sociales et à faire augmenter la pauvreté, surtout celle des plus âgés. Cette augmentation de la pauvreté n’est pas compensée par une croissance notable de la productivité, puisqu’en général, dans le monde du travail, les innovations techniques vont de pair avec des licenciements.

Dans l’avenir, les tensions sociales et les conflits seront de plus en plus nombreux, et l’État surendetté ne sera plus en mesure de multiplier les prestations et les subventions pour acheter la paix sociale. Il lui faudra au contraire les réduire pour ne pas finir par étrangler complètement le contribuable.

Le conflit entre les générations ne sera plus gérable, dans la mesure où les plus vieux au nombre proportionnellement surdimensionné, seront à la charge des plus jeunes. Alors que la demande d’une prolongation de la vie professionnelle se fera de plus en plus pressante, les vieux pèseront de tout leur poids pour défendre leurs acquis. Le système de répartition actuel qui finance les retraites par les cotisations des actifs ne sera plus viable. Pour échapper à la pauvreté qui les menacera une fois l’âge venu, bien des jeunes -et pas seulement les plus qualifiés-, quitteront leur pays, ce qui aggravera encore les problèmes.

La répartition inégale des immigrés musulmans selon les régions provoquera divers types de conflits. Il y a un réel danger de voir certains quartiers de zones fortement urbanisées se transmuer en ghettos islamistes mais aussi en bastions des conflits ethniques et religieux. Les tensions politiques et culturelles entre une majorité de la population native et des sociétés musulmanes parallèles ne pourront plus être maintenues sous contrôle. La conséquence en sera une radicalisation des positions et une rupture du dialogue.

Globalement, notre société est menacée par une grave scission qui n’ébranle pas seulement ses fondements, mais les sape aussi sournoisement. Il s’y rajoute la crise de l’UE et de ses états membres dont les bulles immobilières, les faillites bancaires, les dettes abyssales de certains états et les faillites d’états qui s’annoncent, sont la nouvelle expression. L’Europe est menacée par un crépuscule des dieux qui semble vouloir engloutir le rêve d’une nouvelle civilisation. L’union monétaire et l’observation stricte de certains critères économiques dans chaque état, étaient censées garantir la stabilité des pays de l’Union. En réalité, certains pays à l’économie faible n’avaient pas la volonté, ou plutôt la capacité, de participer à la mise sur pied d’une politique économique et financière commune. Les taux de crédit favorables de la BCE ont tenté autant les états que les banques de s’adonner à une politique d’endettement et à des opérations financières risquées. C’est au plus tard avec la faillite de la Grèce qui n’aurait jamais dû être, que la chimère de l’union a dû céder le pas à une crue réalité. Le problème premier de l’UE reste la disparité économique entre les états et l’endettement colossal de quelques uns d’entre eux.

Une monnaie commune présuppose une politique financière et économique commune, mais aussi un niveau économique comparable. Beaucoup d’états de l’UE ne remplissent aucune de ces deux conditions: la Grèce, l’Italie, l’Espagne et le Portugal ne se sont ni tenus à une politique économique rigoureuse, ni n’ont mis en route les réformes économiques indispensables. Les doutes de la banque fédérale allemande en ce qui concernait la possible intégration d’états aux finances anémiques, se sont révélés à postériori parfaitement justifiés. Le changement monétaire aurait nécessité une modification de la politique financière et économique de beaucoup d’états membres, dans la mesure où les désavantages en matière de concurrence et les endettements importants ne pouvaient plus être compensés par une dévaluation de la monnaie nationale. Dans le cadre d’une politique économique européenne commune, il aurait été indispensable non seulement de surveiller les différentes évolutions nationales, mais aussi d’en corriger certaines sans attendre, voire d’en prendre l’une ou l’autre en main.

L’adhésion de certains pays à la monnaie commune fut prématurée, et les responsables politique européens n’ont pas eu la volonté de réfléchir de manière critique à ces risques, et aux dangers du maintien de particularismes nationaux. L’aide aux pays touchés peut certes passer par le soutien des autres pays membres, par l’échelonnement de la dette ou par la faillite des états en question. Mais le soutien économique par un fond de protection commun ou par des emprunts européens ne saurait être assumé à long terme ni sur le plan politique, ni sur le plan financier. Si quelques états sont en permanence condamnés à en perfuser financièrement d’autres, c’est la survie même de l’UE qui s’en trouvera menacée.

La dissimulation des problèmes démographiques et de leurs conséquences sociales, économiques et civilisationnelles est pratiquée par tous les partis. C’est le grand tabou de nos responsables politiques et de nos médias, pour maintenir l’illusion d’une société prospère et d’un état providence attentionné. Les deux appartiennent pourtant au passé et ne sauraient être ressuscités. D’ici quelques années, cette bulle aussi va exploser et c’est là au plus tard que Barbara Tuchman (2) pourrait rajouter un nouveau chapitre à son livre « La marche folle de l’histoire »: de la folie des gouvernants de la fin du XXème et du début du XIX siècle.

Ce silence de mort autour d’un de nos plus grands problèmes politiques et sociétaux se payera très cher et ébranlera de manière encore insoupçonnée la légitimité du système politique et de ses représentants. La violence et la portée de cette rupture sociale risquent d’avoir des conséquences imprévisibles.

Selon Max Weber, les deux péchés mortels en politique sont « le manque de pertinence et l’irresponsabilité, qui lui est souvent mais pas toujours identique ». C’est ce que pratiquent la plupart des élites politiques et des médias en essayant de dissimuler et de faire peu de cas des conséquences de l’évolution démographique et de l’échec du multiculturalisme dans leurs discours politiques. Les élites refusent de supporter la responsabilité de l’évolution sociale durant la dernière décennie, et se révèlent incapables d’assumer les erreurs d’une politique d’immigration qui est un échec indiscutable. Mais ils mettent aussi en jeu rien moins que l’avenir de notre société. Des partis populistes exploiteront la crise des partis traditionnels pour s’enraciner dans le Parlement. Dans l’avenir, il sera de plus en plus difficile de mettre sur pied des coalitions de gouvernement approximativement stables, ce qui bloquera le système politique par l’intérieur. Et des gouvernements faibles ne seront pas en mesure d’entreprendre des réformes importantes, ni d’appliquer une politique sur le long terme.

La spirale des conflits ethniques et religieux, la paupérisation d’une importante partie de la population et l’incapacité d’agir des gouvernements, s’enroulera de plus en plus, jusqu’au passage à la violence sociale et politique : la guerre civile.

L’avenir de beaucoup de sociétés européennes sera marqué par l’adhésion de plus en plus faible des habitants à la société préexistante, et leur refuge dans des contre-sociétés. Une évolution qui relativise dangereusement le contrat social entre les divers âges, les couches sociales et les milieux culturels. Les conséquences en sont aisément prévisibles : une augmentation de la criminalité, une dégradation des villes avec la constitution de bidonvilles, avec des conflits ethniques et des guerres de gangs, un extrémisme politique et avec tout cela l’effondrement du consensus politique et social.

La révolte à venir dégénérera en une révolution asymétrique : sans une direction politique aux plans et aux idées claires, de nombreux conflits éclateront, et qui sont bien loin de mener à un nouveau contrat social. Et avec cela, le « projet des temps modernes » sera définitivement un échec.

La seule perspective porteuse d’avenir pour les sociétés européennes réside dans le dépassement de l’idéologie multiculturelle et la mise à plat des problèmes dissimulés. Un retour à l’état nation classique et à sa culture n’est plus souhaitable, ni possible. La seule alternative raisonnable est une civilisation européenne globale, exigeante et défendant ses valeurs. Ce qui signifie que les européens se doivent d’enterrer leurs utopies romantiques pour repenser le projet d’une société postmoderne ouverte.

(Die Presse, édition du 14.04.2012)

Source, en allemand : SOS – ÖSTERREICH.

1) Herwig Birg est un universitaire spécialiste de la démographie et des mouvements migratoires qui s’est, à de multiples reprises, penché sur la situation démographique allemande.
« Le taux de croissance de la population européenne était comparable au XVIIIème siècle à celui du restant du monde. La révolution industrielle a permis à l’Europe de dépasser le taux de croissance mondial à la fin du XIXème siècle, jusqu’au retournement de situation au XXème. Depuis le début du XXIème siècle, l’Europe est la seule partie du monde dont la population décroit malgré une immigration massive. En schématisant, on peut avancer qu’autant l’industrialisation a été la cause d’une accélération de la croissance démographique, autant elle a ensuite contribué à son ralentissement puis finalement à sa décroissance ». in: « Ce qui attend l’Allemagne- la logique incontournable de la démographie », contribution aux Annales de Tel Aviv pour l’histoire allemande, XXXV(2007).

Les conclusions de Herwig Birg ont été critiquées par la gauche qui y aurait décelé une dramatisation infondée de la situation !

2) Barbara Wertheim Tuchman, The March of Folly : from Troy to Vietnam, Ballantine Books, nombreuses rééditions depuis 1985 ; en traduction française, La Marche folle de l’histoire, de Troie au Vietnam, Robert Laffont, 1992.

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