20/02/2012 – 08h15
NANTES/NAONED (NOVOpress Breizh) — Dans le cadre des concerts des « Grandes voix bretonnes » qui se tiennent au Château des ducs de Bretagne à Nantes, on pourra entendre, le 2 et le 3 mars , le « chant des sardinières », ces ouvrières bretonnes qui travaillaient dans les conserveries de sardines du Sud-Finistère.
Marie-Aline Lagadic sa fille Klervi Rivière accompagnées de François Gouzien au piano et d’Alain Trévarin à l’accordéon présentent un florilège de ce que chantaient les ouvrières des très nombreuses conserveries de poisson qui s’étaient installées sur les côtes dans le sud du Finistère, sur une période d’un siècle qui s’étend de 1860, où les premières conserveries virent le jour à 1960, époque à laquelle on enregistra les premières fermetures.
Comptant plusieurs sardinières dans sa famille, Marie-Aline Lagadic a effectué un remarquable travail de collecte de leurs chants dans le but de les faire revivre. « Ces chants illustraient le quotidien et les états d’âme des ouvrières. Il y avait des chants ancestraux, des chants tristes, des chants satiriques, des chants grivois, de grands classiques traditionnels parfois adaptés à la vie des gens de mer ou des compositions spécifiques aux populations littorales. Les femmes interprétaient des mélopées ancestrales de la région, des gwerziou, ou complaintes » écrit-elle.*
C’est que le travail était dur, explique-t-elle, et chanter aidait à tenir le rythme : « Les femmes embauchaient à l’usine à l’arrivée des bateaux, généralement en fin d’après-midi. En arrivant elles chantaient souvent des cantiques à la Vierge et récitaient les prières de l’Angelus. Vers minuit, quand la fatigue commençait à se faire sentir, la contremaîtresse lançait une chanson afin de soutenir le rythme de travail. Faute de moyens de réfrigération, il fallait travailler jusqu’à ce que tout soit emballé, même s’il fallait y passer la nuit et une partie de la matinée. Bref, si on chantait, ce n’était pas seulement pour s’amuser. » (id)
A l’occasion des grandes grèves qui éclatèrent dans les années 1920, à Douarnenez (1924), à Lesconil et au Guilvinec (1926), à Saint-Guénolé-Penmac’h (1927), le répertoire des « penn-sardines » (sardinières) s’enrichit également de chants anarchistes et révolutionnaires. Le célèbre « Saluez riches heureux », qui ponctuera leurs luttes pour un meilleur salaire, deviendra vite un chant interdit, sous peine de licenciement !
Grâce au talent de Marie-Aline Lagadic et de son groupe, c’est toute une époque qui revit, celle d’une industrie de la conserve de sardine aujourd’hui quasiment disparue et celle des Bretonnes qui y travaillèrent. A ne pas manquer.
*Marie-Aline Lagadic « Le chant à l’usine », dans Conserveries en Bretagne, éditions Coop Breizh 2007.