Clément Mesdon revient dans ces quatre articles sur ce que fut la politique coloniale de la France. Alors que le débat sur la colonisation « a échappé aux historiens pour être monopolisé par des groupes mémoriels » (B. Lugan), c’est en historien authentique, soucieux de retracer la réalité de ce qu’il décrit, que l’auteur aborde la question coloniale. Traitant d’une question qui demeure trop souvent passionnelle, l’auteur s’est efforcé d’instruire à charge et à décharge le dossier d’un phénomène qui, s’il a concerné la France au premier chef pendant moins d’un siècle, s’est manifesté à toutes époques et en tous lieux. Et qui se perpétue aujourd’hui sous des formes qui, pour être nouvelles, n’en sont pas moins aussi importantes.
Dans la période qui suit la conquête, le pouvoir colonial doit affronter des révoltes qui tiennent souvent à l’excès d’imposition, de travail forcé et d’enrôlement dans l’armée. D’autres ont un caractère nationaliste. On peut en citer plusieurs. Parmi les plus notables, dans l’ordre chronologique :
– 1870 :La Kabylie.
– 1883 : Hué en Indochine.
– 1921-1925 : Le Rif au Maroc, avec Abd el-Krim.
– 1925 : Les Druses en Syrie.
– 1927-1930 : Les Bayas en Afrique équatoriale.
– 1930 : La mutinerie de Yen Bay en Indochine.
– 1945 : L’est algérien, dans le Constantinois
– 1947 : Madagascar.

Dans tous les cas, la répression est sévère, impitoyable surtout lorsque ces soulèvements ont été précédés par des massacres de colons ou d’employés de l’administration. Le chiffre des victimes a été presque toujours instrumentalisé, tant par les autorités coloniales de l’époque que par les dirigeants des anciennes colonies. Les premières minimisant les chiffres, les seconds les optimisant si l’on peut dire. Le cas le plus flagrant est évidemment celui de la guerre d’Algérie. Le gouvernement algérien s’en tient à un million de « martyrs », chiffre qui multiplie par trois ou par quatre le nombre effectif de ces victimes. Nombre d’historiens français et algériens (dissidents) se sont élevés contre cette falsification. Alors que les pertes françaises s’élèvent à au moins 50 000 morts et disparus (en tenant compte des supplétifs musulmans massacrés après l’indépendance), celles des indépendantistes ne peuvent excéder 300 000 personnes, y compris les victimes civiles. Toutes évaluations qu’il sera difficile voire impossible d’affiner davantage.
Mais il est d’éminents spécialistes pour se barder de certitudes comme Madame Coquery-Vidrovitch qui a repris à son compte la fable du million de morts et en a même ajouté un autre pour la conquête de 1830 et ses suites… Mais laissons-là le marigot de ces dénombrements flottants au gré des idéologies et passons à l’exploitation forcément « éhontée » des colonies. Pour les historiens et essayistes flagellants, le verdict ne bougera plus : tous coupables, administrateurs, militaires, affairistes, colons, commerçants ; tous exécutants d’un capitalisme prédateur commandé depuis Paris ou Marseille, la cité colonialiste par excellence.
Clément Mesdon
Le premier article est ici.
(A suivre)
Source : Novopress Breizh.