Entretien avec Konstantin Dobrilović, membre du FPÖ et engagé pour le Kosovo-Serbe

22 décembre 2011 | Actualités, Politique

– Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Mon nom est Konstantin Dobrilović, je suis né en 1984 à Münster en Westphalie (Allemagne), mes parents sont originaires de la Republika Srpska (Serbie). Je suis un théologien.

– Quel est votre rôle dans le FPÖ et pourquoi le FPÖ est-il engagé pour la Serbie et pour les Serbes du Kosovo ?

Depuis 2010, je suis le président de la plate-forme chrétienne libertaire*. Celle-ci unit les chrétiens de toute dénomination dans l’Est et le Sud-Est de l’Europe ainsi que les chrétiens orientaux, dont le statut est plus difficile, surtout après le “printemps arabe”. La plate-forme chrétienne libertaire organise également des événements, le prochain étant le 23 Janvier à Vienne, avec l’organisation d’une conférence sur le Kosovo à laquelle participeront le leader du FPÖ Heinz-Christian Strache, mais aussi l’ex-officier norvégien de la KFOR Kristian Kahrs qui était auparavant en poste au Kosovo.

Le FPÖ est engagé non seulement pour les Serbes, mais pour tous les peuples à qui une injustice est faite. Cela est particulièrement vrai pour les Serbes au Kosovo. Le chef du FPÖ Heinz-Christian Strache a toujours été au premier plan dans l’enquête. Récemment, il a critiqué le traitement de la Serbie concernant son statut d’adhésion à l’UE, ainsi que le traitement dédaigneux du convoi d’aide russe (NDLR: un convoi humanitaire russe à destination du Kosovo avait été bloqué la semaine dernière par la force européenne avant d’être finalement autorisé après que Moscou ait tapé du poing sur la table). D’autres responsables du FPÖ, comme l’eurodéputé Andreas Mölzer ou le porte-parole de politique étrangère et membre du Conseil national autrichien Dr. Johannes Hübner sont également intervenus pour le Kosovo Serbe à de nombreuses reprises

– Vous venez de rentrer de Serbie, quelle est la situation là-bas à l’heure actuelle ? Quelle est la position des Serbes du Kosovo? Des nouvelles persécutions ont elles été constatées sur place ?

La situation actuelle en Serbie est dramatique, car pour le gouvernement actuel de la Serbie les intérêts de l’UE sont plus importants que ceux des Serbes. La Serbie est une partie de l’Europe, mais l’Europe est plus que l’Union européenne. La situation des Serbes au Kosovo est extrêmement déprimante. Les persécutions ont lieu de façon ininterrompue de la part des musulmans. Depuis 1999, les Serbes comptent 1002 morts dans des attaques sous les yeux de la communauté internationale. À ce jour, aucun des assassins n’a été traduit en justice.

La population serbe qui reste au Kosovo est menacée chaque jour par des populations qui souhaiteraient les voir quitter le berceau de la Serbie. Dans la vie quotidienne, les citoyens serbes sont discriminés et provoqués. Pour les gens dans les enclaves, c’est pire, ils sont pratiquement coupés du reste du monde et ont peu de liberté de mouvement. Il arrive également que des moines et des nonnes orthodoxes soient kidnappés ou lapidés dans la rue. Les enfants serbes ne peuvent pas aller à l’école non accompagnés, parce que ce serait trop dangereux. Le KPS (Kosovo Police Service) parle des délinquants comme étant des cas isolés ou des personnes souffrant de troubles mentaux et rien n’est donc fait pour améliorer la situation.

Enfin, le gouvernement albanais du Kosovo fait tout pour supprimer toute trace d’histoire serbe du Kosovo (des monastères orthodoxes sont détruits et remplacés) et un véritable travail de propagande est effectué, notamment afin de convaincre l’opinion internationale et les habitants que le Kosovo serait en fait une ancienne propriété de l’Albanie et non pas le berceau de la Serbie.

Pour les Albanais il est également important que le nom “Metohija” n’apparaissent plus car ce mot** indique que 70% du pays appartient à l’Eglise orthodoxe serbe.

 – Comment avez vous réagi, aux côtés du peuple Serbe concernant l’incident de la semaine dernière avec le convoi d’aide russe bloqué par l’EULEX ?

Cet incident a clairement démontré que la mal nommée Force de secours international (European Union Rule of Law Mission in Kosovo, EULEX) ne soutient en réalité que le gouvernement albanais du Kosovo. Les gens en Serbie sont reconnaissants que le Gouvernement de la Fédération de Russie ait envoyé des secours au Kosovo et ce n’est d’ailleurs pas la première fois. Pendant la guerre des Balkans dans les années quatre-vingt-dix, les Serbes avaient déjà reçu de l’aide de la Russie, la solidarité orthodoxe étant très forte. Personnellement, je suis également très reconnaissant envers le peuple russe qui est un véritable ami et un grand allié des Serbes.

– La Russie pourrait-elle faire plus de pression sur le plan international pour améliorer la situation des Serbes au Kosovo? Est-ce que c’est possible ?

Il serait bon que la Russie le fasse, mais il y a malheureusement en Europe de l’Ouest trop de sentiment “anti-russe” prôné notamment par les gouvernements pour qu’une vraie coopération et une vraie écoute à l’égard des russes soit mise en place. Si la Russie était écoutée, le Kosovo n’aurait bien évidemment pas été reconnu par plusieurs pays européens, dont la France.

– Comment voyez-vous l’actuelle situation UE-Serbie et Russie-Serbie ?

Depuis le 9 décembre 2011 les relations avec l’UE sont à nouveau refroidies puisque la Serbie n’a pas reçu le statut de pays candidat alors qu’elle remplit toutes les conditions de Bruxelles. Mais apparemment, cela ne suffit pas pour l’UE : l’UE veut la reconnaissance du Kosovo par Belgrade, alors que la moitié des pays de l’UE ne reconnaissent pas cet Etat tout comme la moitié des pays de l’OTAN. Les relations entre la Russie et la Serbie ont toujours été et sont toujours très bonnes bien que le gouvernement actuel soit pro-UE et ait ignoré la Russie à plusieurs reprises. Cependant, les Serbes veulent également garder de bonnes relations avec les autres états, comme les États-Unis, ou d’autres pays extra-européens.

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*) “Libertaire” peut avoir quelques connotations en français que le mot allemand “freiheitlich” n’a pas. En allemand ce mot signifie “d’un esprit libre”, ou “épris de liberté” ; le terme désigne un mouvement politique principalement (mais pas seulement) en Autriche, qui est aussi appelé le “troisième camp” (c’est à dire ni socialiste, ni conservateur), typiquement représentée par le Parti de la Liberté d’Autriche (FPÖ).

**) les Albanais parlent du “Kosovo”, les Serbes du “Kosovo et Metohija” … “Metohija” = “La Métochie” (en serbe метохија, du grec μετοχή, “communauté”), http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9tochie

 

 

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