01/11/11 – 19h30
LONDRES (NOVOpress) – A cross between a socialist and a socialite, « une combinaison de socialiste et de mondain » : c’est en ces termes que Yes, prime minister, l’excellente série satirique de la BBC dans les années 1980, caractérisait « l’évêque anglican idéal ». Dans l’épisode en question (« The Bishop’s Gambit »), le Premier Ministre finit par nommer évêque un spécialiste de l’Islam, qui définit la Bible comme « une sorte de Coran pour chrétiens ». Vingt-cinq ans plus tard, les choses ne se sont pas améliorées : l’Église anglicane a aujourd’hui la triste distinction d’être la plus politiquement correcte des Églises chrétiennes européennes et, en conséquence, celle qu’on prend le moins au sérieux.
Le triste état de ce qui fut l’Église officielle du plus vaste Empire que le monde ait connu – au temps où le clergé anglican prônait volontiers « le christianisme musculaire » –, est à nouveau apparu au grand jour depuis que des « indignés » anti-capitalistes, empêchés par la police de s’installer devant la Bourse de Londres, ont planté leurs tentes devant la cathédrale Saint-Paul, le 15 octobre dernier. Leur leader est un étudiant en philosophie, autoproclamé « anarchiste » et fils d’un promoteur immobilier multimillionnaire. Les chanoines de la cathédrale étaient trop proches, par l’idéologie comme par la sociologie, de ces pseudo-rebelles, pour ne pas les accueillir à bras ouverts. Ils ont même ordonné à la police de s’en aller pour ne pas les gêner.
Au fur et à mesure que la « protestation » se pérennisait, les inconvénients d’un tel voisinage ont commencé à apparaître. Le 21 octobre, Saint-Paul a dû fermer, pour la première fois depuis la Seconde Guerre Mondiale, à cause des problèmes de sécurité – les « indignés » bloquant notamment les sorties en cas d’incendie. Non seulement les services religieux ont été interrompus mais, l’entrée étant payante pour les touristes, la cathédrale a perdu au moins 16.000 livres par jour.
Dans l’intervalle, l’imposture des « indignés » est devenue évidente. Des journalistes du Daily Telegraph ont pu vérifier grâce à une caméra thermique que la plupart des tentes étaient inoccupées la nuit, les neuf dixièmes de ces grands rebelles préférant rentrer dormir à la maison. Le principal signe d’occupation était l’odeur de marijuana dans l’air.
Dans la journée, selon un reporter « infiltré » du Daily Mail, « une activité essentielle consiste à s’asseoir en rond pour fumer des joints et descendre de la bière ». Des gens ivres urinent sur les marches de la cathédrale et sur les tentes. « Dans leur vingtaine, avec une majorité de filles », la plupart des « protestataires » sont des étudiants des universités londoniennes, qui se partagent entre le campement et leurs cours. Ils hurlent, avec un accent très middle class, pour convoquer à des meetings divers et variés « pour les femmes, les minorités ethniques, et les groupes de soutien aux LBGT (Lesbian Gay Bisexual Transgender) ». « Un Blanc barbu converti à l’Islam fait le tour du camp en criant dans un mégaphone “Réveillez-vous, ce n’est pas un pique-nique” ».
La réouverture de Saint-Paul, le 27 octobre, qui faisait présager une expulsion des « indignés », a immédiatement provoqué la démission de leur principal partisan au sein du chapitre, le Révérend Dr Giles Fraser, chancelier de la cathédrale et connu entre autres pour son soutien au mariage homosexuel, ses campagnes contre « l’islamophobie » et sa négation publique de l’immortalité de l’âme.
Le chapitre a effectivement voté, le 28 octobre, à une courte majorité, le recours à la justice pour faire évacuer le campement, comme le recommandait le doyen, le Très Révérend Graeme Knowles. Mais les chanoines s’étant presque immédiatement désolidarisés de la décision, c’est cette fois le doyen qui a démissionné, le 31 octobre. Mark Field, député conservateur de la Cité de Londres, a alors accusé le chapitre d’avoir fait de Saint-Paul « une farce nationale ». La cathédrale a décidé aujourd’hui de suspendre son action en justice.
La responsabilité de la crise revient à présent à l’évêque de Londres, le Révérendissime Richard Chartres. Il avait commencé par féliciter les « protestataires » pour leur contribution « à la future forme du monde » mais avait finalement approuvé le recours à la justice pour les faire évacuer, ce qui lui vaut d’être aujourd’hui dénoncé comme un hypocrite.
Richard Chartres, dont on parle beaucoup actuellement pour l’archevêché de Cantorbéry, a succédé comme évêque de Londres à David Hope, célèbre pour avoir déclaré que sa sexualité était « une zone grise », après qu’il eut été « outé » par des militants homosexualistes.
Dans « Yes, Prime Minister », le secrétaire du Premier Ministre lui explique que les Church Commissioners lui proposeront deux candidats pour l’évêché vacant, mais de telle sorte qu’il choisisse nécessairement leur favori. « C’est comme un tour de carte, vous finissez toujours par choisir la carte que le magicien veut vous faire prendre. Dans le cas de l’Église d’Angleterre, le choix est généralement between a queen and a knave », entre une dame (une folle) et un valet (une crapule). Le jeu de mots, en tout cas, est intraduisible en français…