A en croire les journalistes romands, on aurait assisté à un cataclysme lors des élections fédérales du dimanche 23 octobre. « Fort recul de l’UDC », « coup d’arrêt pour l’UDC », « fin d’un cycle », ces incantations psalmodiées par la presse reflètent plus les désirs et peurs de journalistes politisés que la réalité des faits.
Certes l’UDC n’a pas progressé de manière aussi fulgurante que lors des dernières élections, pire, elle a même perdu deux à trois pour cents ce qui correspond à sept sièges. Néanmoins, c’est bien vite oublier que le parti a subit une scission il y a quatre ans et qu’un nouveau parti, qui était alors son aile agrarienne, sous les couleurs de Parti bourgeois démocratique, chasse dorénavant sur ses terres. Si l’on additionne les voix de ces deux partis on obtient un résultat plus important que celui de l’UDC lors des dernières élections. Il s’agit donc plus de la confirmation d’un état de fait que d’un quelconque recul. En effet, l’aile agrarienne de l’UDC n’a pas attendu la scission pour s’opposer à son parti quand il s’agissait de voter sur les questions migratoires par exemple. Le rapport de force sur ces questions n’a donc pas changé au Parlement.
D’autant qu’il faut souligner l’élection d’un Mouvement citoyen genevois et d’un membre supplémentaire de la Ligue des Tessinois qui sont des partis globalement en accord avec l’UDC sur les questions migratoires et européennes.
En revanche, la gauche, elle, a réellement perdu de son influence, le Parti Socialiste recule de près de deux pour cents et les Verts perdent même sept sièges. Toutes ces voix se sont retrouvées au centre et particulièrement dans un nouveau parti, les Verts Libéraux. Refusant de voir les questions environnementales détournées par des politiciens très profilés, une bonne partie de l’électorat écologiste s’est précipitée sur une offre électorale moins gauchisante. Ce que confirme la non-réélection du vert Josef Lang, ancien membre de Ligue marxiste révolutionnaire.
Toutefois, si les Verts Libéraux ont bénéficié de l’effet de nouveauté et si le Parti bourgeois démocratique n’est que l’expression institutionnalisée d’un courant politique préexistant, leur avenir dépendra de l’épreuve du feu que constituera la prochaine législature. Le flou qui règne sur leur ligne politique risque d’avoir les mêmes conséquences que pour le centre-droit traditionnel incarné par le Parti démocrate-chrétien et le Parti libéral-radical et qui n’en finit pas de perdre des sièges depuis des décennies. Même si les Suisses aiment la discussion, pour atteindre le consensus il faut au moins avoir un avis au début. Le centre-droit qui se gausse d’être pragmatique ferait bien de s’en rappeler.
Enfin, le célèbre Oskar Freysinger qui s’est vu reprocher dernièrement par certains de ses camarades de parti une manière peu suisse de faire de politique à cause de son style provocateur et de ses visites à des partis populistes européens arrive dans le canton du Valais en seconde position dans la course au Conseil National et en troisième pour celle au Conseil des États. Il s’agit donc d’un des seuls UDC qui peut se vanter d’une importante progression, qui plus est dans un canton verrouillé traditionnellement par le Parti démocrate-chrétien dont c’est l’un des sanctuaires. Alors que l’UDC national a misé sur une campagne moins provocatrice pour placer des candidats plus rassembleurs à la chambre haute, la méthode Freysinger apparait comme la piste à suivre pour sortir de la stagnation et reprendre le chemin du succès.
Jean-David Cattin